MOYEN-ORIENT
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Gaza: vol d’organe sur les corps de Palestiniens, une pratique israélienne vieille de 30 ans
De nouvelles accusations de prélèvements d’organes sur des Palestiniens tués pendant le génocide à Gaza ont été formulées par les autorités locales après la restitution de plusieurs dépouilles par Israël dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu.
Gaza: vol d’organe sur les corps de Palestiniens, une pratique israélienne vieille de 30 ans
Plusieurs dépouilles remises par Israël présentaient des organes manquants, notamment des cornées, des cochlées, des foies et des reins. / Reuters
il y a 4 heures

Le directeur du bureau des médias du gouvernement de Gaza, Ismaïl al-Thawabta, a déclaré le 18 octobre dernier que plusieurs dépouilles remises par Israël présentaient des organes manquants, notamment des cornées, des cochlées, des foies et des reins.

Il a demandé à la communauté internationale de diligenter une enquête indépendante afin de vérifier ces violations du droit humanitaire.

Selon les autorités locales, les corps auraient été rendus dans un état de décomposition avancé, certains montrant des signes de torture ou de blessures suspectes pouvant évoquer des exécutions sommaires.

Si les autorités israéliennes rejettent toute allégation de prélèvements d’organes sur les Palestiniens, ces accusations ne sont pas nouvelles. Des précédents reconnus par le passé font peser de lourds soupçons sur leur récit israélien actuel.

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Une pratique israélienne vieille de 30 ans 

Selon une enquête menée par la journaliste britannique Harriet Williamson pour Novara Media, depuis la Première Intifada (1987-1993), des familles palestiniennes affirment que les corps de leurs proches, rendus par Israël, présentaient des traces de sutures inhabituelles. Ces rumeurs ont trouvé un écho dans plusieurs enquêtes académiques et journalistiques menées en Israël même.

En 2014, l’anthropologue israélienne Meira Weiss, ancienne chercheuse à l’Institut médico-légal d’Abu Kabir (le principal centre de médecine légale israélien), a apporté sa propre contribution à ce débat en publiant Over Their Dead Bodies. Dans cet ouvrage, elle décrit les pratiques d’autopsies menées dans les années 1980-1990 sur des Palestiniens, soldats israéliens et travailleurs étrangers.

Selon elle, des tissus et organes étaient parfois prélevés à des fins scientifiques ou médicales sans autorisation explicite des familles.

Ces propos ont été corroborés partiellement par les déclarations du professeur Yehuda Hiss, ancien directeur de l’Institut d’Abu Kabir, dans un entretien accordé en 2009 à Nancy Scheper-Hughes, anthropologue américaine spécialisée dans le trafic d’organes. 

Hiss avait alors reconnu que, dans les années 1990, des cornées, de la peau et des valves cardiaques avaient été prélevées sur des cadavres — palestiniens, israéliens et étrangers — souvent sans consentement formel.

Ces révélations, relayées à l’époque par plusieurs médias internationaux, dont Associated Press et The Guardian, avaient conduit le ministère israélien de la Santé à affirmer que de telles pratiques avaient cessé “depuis plus de dix ans” et que de nouvelles règles éthiques encadraient désormais les autopsies.

Les corps palestiniens non restitués

Parallèlement à ces accusations, la question du sort des dépouilles palestiniennes continue d’alimenter les tensions entre Israël et les familles concernées.

Depuis plusieurs décennies, Israël détient des centaines de corps dans ce que les ONG appellent les “cimetières des nombres”, des lieux clos situés en territoire israélien, où les tombes sont identifiées par de simples plaques numérotées.

Selon les organisations de défense des droits humains Al-Haq et Adalah, plus de 350 corps de Palestiniens morts en détention ou tués lors des offensives israéliennes y seraient conservés.

Les familles, souvent privées de toute information sur le lieu exact d’inhumation, réclament leur restitution afin d’organiser des funérailles conformes à la tradition islamique.

En mars 2018, la Knesset a adopté une loi autorisant les forces israéliennes à retenir les dépouilles de Palestiniens. En décembre 2024, un nouveau projet de loi a été déposé pour interdire définitivement la restitution des corps des assaillants présumés.

Pour les autorités israéliennes, ces mesures visent à prévenir les rassemblements politiques ou les glorifications lors des funérailles. Les ONG palestiniennes y voient, au contraire, une violation du droit international humanitaire, qui garantit le droit à une inhumation digne et la restitution des corps aux familles.

Le droit international humanitaire, notamment les Conventions de Genève, interdit toute mutilation de cadavre et tout prélèvement d’organes sans consentement. Les parties à un conflit doivent également s’efforcer d’identifier et de restituer les corps des personnes décédées.

Les retards de restitution et la rétention prolongée de corps palestiniens continuent d’entretenir la méfiance et nourrir des soupçons persistants concernant cette vieille pratique israélienne de vol d'organes.

SOURCE:TRT Français