FRANCE
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Reconnaissance de la Palestine par plusieurs pays occidentaux, un tournant majeur ?
La France reconnait l'État de Palestine ce lundi à New York. Mais cette reconnaissance va-t-elle changer les choses sur le terrain ?
Reconnaissance de la Palestine par plusieurs pays occidentaux, un tournant majeur ?
75% des pays membres des Nations unies ont reconnu la Palestine / Reuters
22 septembre 2025

La Grande Bretagne, l’Australie, le Canada et le Portugal ont reconnu dimanche l’État de Palestine. La France, le Luxembourg, la Belgique devraient suivre aujourd’hui lors d’une conférence sur la solution à deux États organisée par la France et l’Arabie Saoudite. En tout, 10 pays occidentaux supplémentaires vont reconnaître l'État de Palestine, soit 150 pays sur 193 membres de l’ONU. 


Mais que veulent dire ces reconnaissances en série ?Après 1987 et la première Intifada, de nombreux pays ont reconnu la Palestine comme État mais l’Occident n’avait pas suivi ce mouvement. 

Jean-Paul Chagnollaud, président d’honneur de l’Iremmo (Institut de recherche et d’études Méditerranée et Moyen orient), explique sur BFMTV que c’est un tournant majeur. “L'Occident reconnaît enfin le droit à l'autodétermination du peuple palestinien. Vous avez des pays, comme le Canada ou la Grande-Bretagne, très proches d'Israël et collés à la position américaine, qui étaient il y a six mois encore vraiment très loin de l'idée de reconnaître la Palestine”.

Cette reconnaissance plus large permet aussi de renforcer la place de la Palestine aux Nations unies qui siège depuis 2012 en tant qu'État non-membre. Il n’y a aucune chance pour qu’elle devienne un membre à part entière car l'admission d'un État passe par le Conseil de sécurité et les États-Unis, soutien d'Israël, poseront sans doute leur veto.

Concrètement, des ambassades de Palestine vont être ouvertes dans les pays qui ont reconnu la Palestine. Dans l’immédiat, par contre, cela ne va sans doute pas changer la situation sur le terrain pour les cinq millions de Palestiniens.

Que prévoient la France et l’Arabie saoudite pour la Palestine ?

Le geste de la reconnaissance est fort symboliquement. Il permet à l’Occident, grand soutien d’Israël, de se distancer face à une guerre génocidaire à Gaza, mais la France et l’Arabie Saoudite proposent également de lancer un processus politique de négociation, si les Israéliens l'acceptent, pour créer un État de Palestine à côté d'un État d'Israël dans les deux ans qui viennent. 

Comme le souligne et le défend dans un éditorial du journal helvétique le Temps ce dimanche, Madeleine von Holzen, cette reconnaissance est “un acte indispensable parce qu’elle réunit aujourd’hui des nations qui croient encore au droit international et à l’ordre mondial élaboré après la Deuxième Guerre mondiale, c’est précisément une décision qui permet d’envisager une suite.”

Dans le plan franco-saoudien, la suite prendrait la forme d’élections libres et transparentes à Gaza dans les 18 mois qui viennent, mais sans la participation du Hamas.

En RelationTRT Français - Reconnaissance d'un Etat palestinien par Londres, un pas vers une paix "durable" (Mahmoud abbas)

Ce plan associe également Israël aux négociations devant mener à la création d’un État de Palestine mais le Premier ministre Benyamin Netanyahu ne semble pas prêt à entamer quelque discussion que ce soit. Il a déclaré ce week-end qu’il n’y aurait jamais d’État de Palestine. “Cette terre nous appartient”, a-t-il martelé. Il faut également souligner que depuis 25 ans, Israël a toujours refusé de négocier la création d’un État de Palestine.

Une Autorité palestinienne au bord de la faillite

Israël qui ne veut pas d’un État palestinien fait tout pour empêcher sa création. Il a tout fait pour affaiblir l’Autorité palestinienne depuis sa création puisque Tel Aviv exerce un contrôle et un chantage financier important sur cette entité. Israël qui perçoit les taxes douanières pour les Palestiniens et leur en reverse normalement une part chaque mois l’a bloqué maintes fois à son bon vouloir. .Ainsi, Tel Aviv a cessé d’effectuer ces transferts peu après le début de la guerre à Gaza, retenant des fonds qui représentent entre 60 et 70 % du budget public palestinien total.

Les fonds ont aussi encore été gelés en mai 2024 après la reconnaissance de l’État palestinien par l’Espagne, l’Irlande et la Norvège. 


En mai 2024, la Banque mondiale publiait un rapport alarmant sur la situation financière de l’Autorité palestinienne laissant entrevoir la perspective d’un “effondrement fiscal imminent”. Aujourd’hui, des milliers de fonctionnaires ne perçoivent plus de salaires.

Qui va démonter les colonies qui se multiplient ?

Le gouvernement Netanyahu n’a eu de cesse de favoriser et étendre la colonisation en Cisjordanie occupée pour rendre impossible sur le terrain la création viable d’un État.

Le territoire de la Cisjordanie est aujourd’hui morcelé, truffé de barrages, de colonies officielles et d’avant-postes, ces colonies non déclarées tolérées par Israël.

En 2023, par exemple, Israël a établi un nombre record de colonies en Cisjordanie, forçant 21 communautés palestiniennes à quitter leurs maisons. En juillet 2025, Israël a lancé le projet E1 qui prévoit l’extension de plusieurs colonies existantes à Jérusalem Est, ce qui va concrètement couper la Cisjordanie en deux parties d’Est en Ouest.

Alors se pose la question, Israël est-il un partenaire de négociation fiable pour la création d’un État de Palestine ? Qui dans le camp occidental est prêt à imposer le respect des frontières de la Palestine, ou le démantèlement des colonies ?

Si la communauté internationale se contente de reconnaître cet Etat, ce sera un nouveau renoncement face à un duo israélo-américain qui veut reconstruire Gaza et expulser ses habitants.

SOURCE:TRT français et agences