Des procédures défaillantes d'évaluation de l'âge conduisent de nombreux enfants à être traités à tort comme des adultes, les contraignant souvent à survivre sans abri, sans nourriture, sans eau, sans soins de santé ni éducation, alerte un rapport publié par l’ONU jeudi.
La France commet des "violations graves et systématiques" des droits des enfants demandeurs d'asile non accompagnés, laissant nombre d'entre eux sans abri, privés de soins de base et dans des conditions dégradantes, a déclaré un organisme de surveillance de l'ONU.
Le Comité des droits de l'enfant des Nations unies a constaté que la France assurait une protection aux mineurs non accompagnés, mais a averti que des procédures défaillantes d'évaluation de l'âge conduisaient à ce que de nombreux enfants soient traités à tort comme des adultes.
Ces enfants sont privés d'accès au système de protection de l'enfance et "risquent fortement d'être exposés à la traite, aux abus, aux mauvais traitements et aux violences policières", indique le rapport publié jeudi.
Le rapport souligne l'absence de chiffres officiels complets sur le nombre d'enfants migrants non accompagnés concernés, mais souligne que le problème est "généralisé et persistant".
Le comité, dont les 18 experts indépendants sont chargés de surveiller la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant par les pays signataires du traité, a conclu que la France avait manqué à ses obligations.
Paris, a-t-il déclaré, a violé de nombreux droits de l'enfant, notamment le droit aux soins de santé et à l'éducation, ainsi que l'interdiction de la détention pour des motifs liés à la migration et des traitements inhumains ou dégradants.
Des enfants vulnérables face à des procédures défaillantes
Il a souligné qu'en France, la présomption de minorité ne s'appliquait que jusqu'à la décision initiale de détermination de l'âge, ce qui signifie que les enfants identifiés à tort comme adultes sont traités comme tels pendant toute la durée de la procédure, qui dure plusieurs mois.
Nombre d'entre eux sont alors "abandonnés dans la rue, dans des parcs ou dans des camps de fortune informels, doivent survivre sans nourriture ni eau potable en quantité suffisante, et sans soins de santé ni éducation", a-t-il averti.
Le comité a également indiqué que "la proportion de personnes déclarées mineures après l'annulation de leur réévaluation de l'âge varie de 50 à 80 %".
Le rapport a également documenté des situations graves touchant les enfants migrants non accompagnés transitant par la France pour rejoindre le Royaume-Uni, qui ne bénéficient pas de l'aide du système français de protection de l'enfance.
Certains d'entre eux ont été placés en zone d'attente dans les aéroports ou autres centres de rétention aux frontières, ce qui constitue une privation de liberté "disproportionnée et donc arbitraire", selon le rapport, qui met en garde contre les risques pour la santé mentale des enfants.
Le comité, dont les avis sont non-contraignants, mais ont un impact sur la réputation des pays signataires de la Convention, a appelé la France à accorder le bénéfice du doute quant à leur statut de minorité.
Parmi ses recommandations, il a également exhorté le pays à garantir un logement, de la nourriture et de l'eau adéquats à tous ceux qui se déclarent enfants migrants non accompagnés, afin qu'aucun enfant ne soit contraint de vivre dans un camp informel ou dans la rue.
Dans une réponse au comité, consultée par l'AFP, le gouvernement français a souligné que le plan stratégique 2023-2027 pour la protection judiciaire de la jeunesse "a renforcé et coordonné le soutien aux groupes prioritaires et particulièrement vulnérables", comme les mineurs non accompagnés.