Des heurts ont éclaté à Dakar au Sénégal / Photo: AA (AA)

La tension est vive à Dakar alors que les députés sénégalais s’apprêtent à examiner en fin de matinée de ce lundi une proposition de loi controversée sur le report de l'élection présidentielle annoncé par le chef de l'État Macky Sall. La décision de reporter sine die les élections a donné lieu à des affrontements dimanche entre des opposants et les forces de l'ordre dans la capitale sénégalaise.

L'ajournement de la présidentielle est rejeté par plusieurs candidats de l'opposition, qui ont manifesté dimanche à Dakar contre la mesure. Les forces de l'ordre ont procédé à de nombreuses arrestations, selon des opposants, et dispersé les manifestants à l'aide de grenades lacrymogènes.

L'opposante et ancienne Première ministre Aminata Touré, autre farouche adversaire de l'ajournement, a été brièvement arrêtée lors d'un des rassemblements, alors que le signal de la télévision Walf TV a été interrompu par les autorités, pendant qu’elle diffusait les images des protestations pour “incitation à la violence”. .

Dans une allocution à la radio et à la télévision, Macky Sall avait annoncé samedi, quelques heures avant l'ouverture de la campagne électorale, avoir signé un décret reportant la présidentielle initialement prévue le 25 février. C'est la première fois depuis 1963 qu'une présidentielle au suffrage universel direct est reportée au Sénégal, un pays qui n'a jamais connu de coup d'État, fait rare sur le continent.

Assemblée nationale contre Conseil constitutionnel

L'ajournement du scrutin a été annoncé sur fond de conflit entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, qui a validé en janvier vingt candidatures, un record, mais en a rejeté plusieurs dizaines d'autres.

Deux ténors de l'opposition ont été exclus: Ousmane Sonko, en prison depuis juillet, et Karim Wade, ministre et fils de l'ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012) qui a remis en question l'intégrité de deux juges constitutionnels et réclamé le report de l'élection.

À son initiative, l'Assemblée a approuvé la semaine dernière la création d'une commission d'enquête sur les conditions de validation des candidatures. Et contre toute attente, des députés du camp présidentiel ont soutenu la démarche.

Ce soutien a aussi nourri le soupçon d'un plan du pouvoir pour ajourner la présidentielle et éviter une défaite alors que le candidat du camp présidentiel, le Premier ministre Amadou Bâ, est contesté dans ses propres rangs et fait face à des dissidents.

Selon le code électoral, un décret fixant la date d'une nouvelle présidentielle doit être publié au plus tard 80 jours avant le scrutin.

La président Sall, élu en 2012 pour cinq ans puis réélu en 2019 pour sept ans ne brigue pas de mandat mais risque d'être encore à son poste au-delà de l'échéance de son mandat, le 2 avril.

Le président de la Commission de l'Union Africaine, Moussa Faki Mahamat, a appelé lundi les Sénégalais à régler leur "différend politique par la concertation, l'entente et le dialogue", après les tensions et violences provoquées par le report de l'élection présidentielle.

Exprimant sa "préoccupation" sur ce report éventuel, il demande aux autorités d'"organiser dans les meilleurs délais les élections, dans la transparence, la paix et la concorde nationale", dans un communiqué publié lundi matin sur le réseau social X.

TRT Français et agences