Les bateaux de la flottille, chargés principalement d’aide humanitaire et de fournitures médicales, ont pris la mer, fin août.
C’était la première fois depuis des années qu’un si grand nombre de navires naviguaient ensemble vers Gaza, transportant 532 civils soutenant la cause palestinienne, venus de plus de 45 pays.
Israël maintient un blocus de Gaza, où vivent près de 2,4 millions de personnes, depuis près de 18 ans, et a encore renforcé le siège en mars en fermant les points de passage et en bloquant la livraison de nourriture et de médicaments, poussant l’enclave à la famine.
Depuis octobre 2023, les bombardements israéliens ont tué plus de 66 000 Palestiniens, pour la plupart des femmes et des enfants.
L’ONU et les organisations de défense des droits humains ont averti à plusieurs reprises que l’enclave devenait inhabitable, avec une propagation rapide de la faim et des maladies.

Comment Israël a réagi ?
Les soldats de la marine israélienne ont embarqué sur les navires et détenu des dizaines de militants à bord, mais 12 heures après le début de l’interception, plusieurs bateaux ont continué à naviguer et approchaient du territoire assiégé jeudi.
Selon le suivi officiel de la flottille, les forces israéliennes ont jusqu’à présent détenu au moins 317 militants à bord de 21 navires, dont 25 citoyens turcs.
Les militants détenus sont transportés vers le port israélien d’Ashdod, d’où ils seront expulsés vers l’Europe, selon le ministère israélien des Affaires étrangères.
Flux en direct et communications brouillés
Parmi les militants détenus par les soldats israéliens se trouvent Greta Thunberg, l’ancienne maire de Barcelone Ada Colau, la députée européenne Rima Hassan et d’autres.
Les bateaux se trouvaient à environ 70 milles nautiques de Gaza lorsqu’ils ont été interceptés, à l’intérieur d’une zone que contrôle Israël pour empêcher tout navire d’approcher.
Les organisateurs ont déclaré que leurs communications, y compris les flux de caméras en direct depuis certains bateaux, avaient été brouillées.
Le ministère israélien des Affaires étrangères a publié des photos et vidéos des militants, affirmant sur X qu’ils étaient “en sécurité et en bonne santé”.
Plus tôt, des diffusions en direct des militants montraient des bateaux israéliens approchant leurs navires, les aspergeant de canons à eau et les aveuglant avec des projecteurs avant que les soldats embarquent.
Prévoyant les interceptions, les militants portant des gilets de sauvetage se sont assis en cercle et ont levé les mains en l’air.
Certains ont réussi à diffuser le moment en direct depuis leur téléphone avant de jeter leurs appareils à la mer.
Que dit le monde ?
L’interception a provoqué une large condamnation. Les partisans de la flottille sont descendus dans les rues de plusieurs villes européennes — Rome, Naples, Barcelone et Athènes — pour dénoncer les actions israéliennes et l’offensive en cours.
Le plus grand syndicat italien a appelé à une grève générale d’une journée, le vendredi, qui devrait bloquer tous les principaux secteurs, y compris les transports et les écoles.
Le ministère turc des Affaires étrangères a fermement condamné l’attaque de la marine israélienne, la qualifiant “d’acte de terrorisme” et de grave violation du droit international dans un communiqué publié mercredi soir.
“Piraterie maritime”
Le ministère turc a déclaré travailler pour assurer la libération immédiate des citoyens turcs et autres militants détenus par les forces israéliennes.
Le président colombien Gustavo Petro a ordonné l’expulsion de l’ensemble de la délégation diplomatique israélienne après la détention de deux Colombiens dans la flottille et a rompu l’accord de libre-échange de la Colombie avec Israël.
Dans un communiqué, le Hamas a exprimé son soutien aux militants et a qualifié l’interception de la flottille par Israël de “crime”, appelant à des manifestations publiques pour condamner Israël.
Promesses de protection des citoyens
L’Europe a exhorté Israël à respecter le droit international et à protéger les militants, les dirigeants avertissant des conséquences humanitaires plus larges.
Les dirigeants asiatiques, dont le Pakistan, la Malaisie et les Maldives, ont fermement dénoncé l’attaque et promis de protéger leurs citoyens.
Le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif a qualifié l’attaque de barbare, tandis que le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim a averti que son pays prendrait toutes les mesures légales pour tenir Tel Aviv responsable.
Que dit le droit maritime international ?
Le droit maritime international limite généralement la juridiction des États à 12 milles nautiques au large, mais Israël invoque une justification militaire en vertu des lois sur les conflits armés.
Les experts en droits humains soutiennent que les missions humanitaires bénéficient du droit de passage protégé.
Yuval Shany, spécialiste du droit international à l’Université hébraïque de Jérusalem-Ouest, a déclaré que tant que le blocus israélien de Gaza est “militairement justifié” — destiné à empêcher l’entrée d’armes — et que le navire tente de briser le siège, Israël se permet d’intercepter le navire après un avertissement préalable.
Or, la justification militaire du blocus et sa légalité sont toutefois contestées.
Cette flottille représente la plus grande mission civile de ce type visant à défier le blocus de Gaza, imposé depuis 18 ans par Israël.
Cet incident rappelle le raid de 2010 contre le Mavi Marmara, où les forces israéliennes avaient tué neuf militants turcs et en avaient blessé plusieurs autres à bord d’un navire humanitaire en route pour Gaza, provoquant une grave crise diplomatique entre la Turquie et Israël.
Les observateurs mettent en garde contre le risque de relancer les tensions et soulignent une fois de plus le blocus en cours de Gaza, que les organisations de défense des droits humains et les instances de l’ONU qualifient de punition collective illégale au regard du droit international.