La Société générale est au cœur d’une controverse après les révélations du Canard enchaîné concernant un questionnaire de recrutement proposé à des candidats postulant à des postes à l’international.
Le document, accessible via la plateforme de recrutement du groupe, comporte des questions portant sur l’appartenance ethnique et l’engagement politique. L’employé à l’origine du signalement interne a depuis été licencié.
Selon l’hebdomadaire satirique, ce questionnaire était disponible sur le site “socgen.taleo.net”, utilisé par la banque pour diffuser ses offres d’emploi, en interne comme en externe.
Présentées comme facultatives, ces questions figurent néanmoins dans la rubrique “Informations personnelles”, intégrée au parcours de candidature et susceptible d’influencer l’accès à un entretien.
Parmi les informations demandées, les candidats sont invités à indiquer le “groupe ethnique” auquel ils s’identifient, à partir de catégories telles que “Européen”, “Moyen-Orient/Arabe”, “Asiatique de l’Est”, “Noir ou Africain-Américain”, “Blanc” ou encore “Hispanique ou Latino”.
Le questionnaire va plus loin en interrogeant les candidats sur leur engagement politique. En cas de réponse positive, il leur est demandé de préciser le nom de l’organisation concernée ainsi que la fonction occupée en son sein.
La découverte de ces pratiques remonte à janvier, lorsqu’un cadre de la Société générale, basé dans la région lyonnaise, a alerté la direction des ressources humaines sur le caractère qu’il estimait “illégal et discriminant” du questionnaire.
Selon Le Canard enchaîné, sa situation professionnelle se serait ensuite rapidement dégradée : mutation, suspension, puis convocation à un entretien préalable au licenciement.
Il a finalement été renvoyé durant l’été, dans des conditions décrites comme brutales, avec retrait immédiat de son matériel professionnel.
Déjà condamné
Sur le plan juridique, la collecte de données relatives à l’origine ethnique ou aux opinions politiques est strictement encadrée par le règlement général sur la protection des données (RGPD), qui interdit en principe le traitement de ces données dites “sensibles”, sauf exceptions très limitées.
Le Code du travail prohibe par ailleurs toute discrimination à l’embauche fondée sur ces critères.
Contactée par Le Canard enchaîné, la Société générale affirme “considérer la diversité comme une force” et assure que les informations collectées sont “anonymisées” et “en aucun cas accessibles aux recruteurs ou aux managers”.
La banque indique également respecter les réglementations en vigueur, précisant que “selon la localisation du poste, des informations personnelles diverses peuvent être demandées”.
Ces révélations interviennent toutefois dans un contexte défavorable pour l’établissement bancaire.
En septembre dernier, la cour d’appel de Paris a condamné la Société générale pour “discrimination en raison de l’origine et du sexe” ainsi que pour “harcèlement moral discriminatoire” à l’encontre d’une ancienne salariée noire, comme l’avait révélé Mediapart.
Plus largement, cette affaire s’inscrit dans un contexte de discriminations persistantes à l’embauche en France. Selon le 18ᵉ baromètre du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail (OIT), publié le 10 décembre, plus de la moitié des candidats racisés déclarent avoir été victimes de discrimination lors de leurs démarches professionnelles.













