FRANCE
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Violences islamophobes : deux policiers relaxés, trois condamnés à 12 mois de sursis
Les deux autres policiers, le conducteur et le chef de bord, qui se trouvaient à l’avant du véhicule, ont été relaxés.
Violences islamophobes : deux policiers relaxés, trois condamnés à 12 mois de sursis
Deux policiers relaxés, trois condamnés à 12 mois de sursis
il y a 7 heures

Le tribunal correctionnel de Nice a condamné, lundi, trois policiers à une peine de 12 mois de prison avec sursis, assortie d’une interdiction d’exercer de six mois, pour violences et injures à caractère raciste. Les condamnés devront verser 1 000 euros à leur victime, ainsi que 800 euros au titre de ses frais d’avocat.

Le tribunal correctionnel a reconnu l’existence de violences psychologiques mais a relaxé les cinq policiers pour les violences physiques, malgré des constatations médico-légales.

Le procureur de Nice, Damien Martinelli, venu requérir en personne, avait réclamé une interdiction définitive d’exercer pour les cinq fonctionnaires, ainsi que des peines allant de 12 à 18 mois de sursis.

Arrestation violente

Le 22 juillet dernier, Mohamed C., jeune ressortissant tunisien de 18 ans, avait été interpellé par une patrouille de police, alors qu’il se trouvait dans le quartier des Moulins, à Nice. Ayant eu le réflexe d’activer le dictaphone de son téléphone, il a enregistré 32 minutes d’audio glaçantes, diffusées dans la salle d’audience lors du procès qui s’est tenu le 24 octobre dernier. C’est sur la base de cet enregistrement que le parquet avait pu saisir l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) afin qu’une enquête soit ouverte.

Durant ces 32 minutes, la victime est injuriée, humiliée et menacée. Aucun des cinq fonctionnaires n’intervient pour faire cesser le supplice du jeune tunisien de 18 ans et des bruits de coups sont audibles. Trente-deux minutes durant lesquelles il est traité de la pire des manières par des fonctionnaires de police, parfois hilares.

On y entend distinctement des policiers le traiter de "sale Arabe", de "bougnoule", de "voleur de France", de "clandé" venu en France pour "violer des Françaises" et "voler les Français".

"Arrête de parler, bougnoule, sinon je t’arrache la tête", "rentre chez toi dans ton pays" peut-on même entendre.

À au moins deux moments distincts, des bruits de coups retentissent alors que la victime pleure et supplie les policiers d’arrêter de lui porter des coups.

L’épisode du Coran au cœur du procès

Un passage particulièrement marquant concerne le traitement du Coran, retrouvé dans la sacoche du jeune homme. La victime affirme avoir été frappée avec le livre sacré, dont des pages auraient été arrachées pour lui être mises dans sa bouche.

"Ils ont déchiré mon Coran, l’un s’est essuyé les aisselles avec. Ils ils ont marché dessus avec leurs chaussures et un policier a essayé de me mettre les pages dans la bouche", a témoigné la victime, alors même que la bande sonore confirme que l’un des fonctionnaires lui a lancé "il n’y a qu’un seul Dieu, c’est Jésus", après avoir proféré des injures contre l’islam.

Sur ces faits précis, les policiers affirment qu’il ne s’agissait pas d’un Coran, mais d’un carnet de comptabilité lié à un trafic de stupéfiants, écrit en arabe et ramassé à proximité d’un point de deal.

Rapidement après les faits, le procureur de la République de Nice, est informé, par les policiers enquêteurs, de l’existence de cet enregistrement dans lequel leurs collègues sont impliqués.

Des versions divergentes

Tout au long de la procédure et lors de leurs auditions, les cinq fonctionnaires ont maintenu leurs versions. Trois d’entre eux ont reconnu des "propos déplacés" ou "houleux", tout en niant la dimension racistes de leurs actes.

Les deux autres — le chauffeur du véhicule de police et le chef de bord — ont assuré  n’avoir absolument rien entendu de ce qui se passait à l’arrière du véhicule.

À l’audience, l’un des prévenus a concédé un "comportement déplacé" et invoqué "un énervement" lié à une situation personnelle, mais également à la difficulté d’exercer dans les quartiers dits "de reconquête républicaine".

"Il y a eu de mauvaises blagues (…). C’était un exutoire (…) après de longues vacations difficiles en quartiers de reconquête républicaine", a-t-il plaidé à la barre.

Alors que la bande sonore enregistrée par la victime et le certificat médical établi par le médecin légiste venaient confirmer qu’elle a subi des violences, les accusés n’ont rien reconnu sur ce volet là.

Un réquisitoire ferme du procureur

Le procureur de la République, Damien Martinelli, a pris la parole pour un réquisitoire sur mesure.

Se disant "triplement triste, d’abord pour ce que Mohamed C. et Amir B. ont subi", mais aussi pour avoir à "requérir contre des fonctionnaires de la police nationale" et "pour l’institution", Damien Martinelli s’était montré intransigeant, pointant des faits d’une extrême gravité.

"Quatre fonctionnaires placés sous la responsabilité d’un cinquième vont humilier. J’ai été frappé par les décalages entre le souvenir lointain de ce qui s’était passé, et l’extrême précision sur ce petit carnet qui ne serait pas un Coran. On est venu nous servir cette histoire du petit carnet de comptes (…). Comment ne pas voir un fond de racisme ordinaire quand on voit l’accumulation de tels propos ? Ce que disent Mohamed C. et Amir B. est confirmé dans l’audio. On peut les croire, même si l’un et l’autre sont connus des services de police. Mohamed C. peut être un délinquant, mais il a le droit et les fonctionnaires de police ont le devoir de le traiter avec respect et dignité", avait-il déclaré lors de son réquisitoire.

Damien Martinelli avait par ailleurs estimé qu’il "était très important d’écouter l’enregistrement".

"C’était très intéressant d’observer la salle pendant la diffusion de l’audio, de regarder les visages qui se pincent en entendant les injures, les bruits de coups. L’enjeux du dossier, ce n’est pas de savoir si untel ou untel a dit « sale bougnoule » ou « sale arabe ». Quand on entend l’audio, on entend du collectif. On entend des applaudissements, on entend « amchi lbled » [retourne au bled]. On entend des fonctionnaires qui évoquent les coups et « je te frappe parce que tu m’énerves  », « il convulse parce qu’il a pris des coups de Coran »", avait-il relevé.


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