FRANCE
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Un collectif de personnalités juives conteste l’assimilation entre antisionisme et antisémitisme
Un collectif de personnalités juives – universitaires, artistes et militants – a publié dans Le Monde une tribune en réponse à un texte d’ Eva Illouz, paru le 18 décembre, où la sociologue affirme que l’antisionisme relève de l’antisémitisme.
Un collectif de personnalités juives conteste l’assimilation entre antisionisme et antisémitisme
Une pancarte sur laquelle on peut lire "L'anti-sionisme n'est pas de l'antisémitisme" lors d'une manifestation, à Berlin le 4 novembre 2023. / TRT Français
il y a 9 heures

Les signataires reconnaissent la pertinence de certaines analyses d’Eva Illouz, notamment sa distinction entre judéophobie et antisémitisme moderne, ainsi que la nécessité de lutter contre les violences antisémites.

Ils contestent toutefois son postulat central selon lequel la critique du sionisme équivaudrait à une forme d’antisémitisme.

“Que l’antisionisme serve dans certains cas de paravent à une haine des juifs, cela n’est pas contestable”, écrivent-ils, avant d’ajouter que cela “ne justifie pas que l’on doive adhérer, sous peine d’être traité d’antisémite, à la doxa du sionisme”.

Le collectif rappelle que le sionisme est un mouvement politique nationaliste visant à regrouper les juifs dans un même État. Selon les auteurs, accepter cette idéologie reviendrait à considérer que les juifs forment un corps distinct des nations dans lesquelles ils vivent. 

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“Accepter cette légitimité revient précisément à considérer que les juifs sont un corps étranger aux nations dans lesquelles ils naissent et vivent”, affirment-ils.

Les signataires interrogent également la définition même du “peuple juif”, soulignant la diversité religieuse, culturelle et historique des communautés juives à travers le monde. 

Ils mettent en garde contre les définitions biologiques ou héréditaires de la judéité, rappelant que “cette définition est aussi celle de certains courants antisémites, qui considèrent qu’un juif, même athée ou converti, reste un juif”.

“Régime d’apartheid”

Concernant l’histoire d’Israël, le collectif conteste l’idée selon laquelle l’antisémitisme dans les pays arabes aurait précédé la création de l’État. Ils rappellent que “l’expulsion des juifs des pays arabes a été postérieure à la création de l’État d’Israël”.

La tribune affirme par ailleurs que la création d’Israël s’est accompagnée d’un processus de colonisation ayant conduit, en 1948, à “l’expulsion de près de 800 000 Arabes palestiniens”.

Les auteurs distinguent toutefois ce fait colonial de l’émergence ultérieure d’une nation israélienne, marquée par “une culture proprement israélienne – musique, cinéma, littérature – avec l’hébreu comme vecteur”.

Les signataires critiquent le caractère ethnico-religieux de l’État israélien, en particulier depuis l’adoption en 2018 de la loi définissant Israël comme “l’État-nation du peuple juif”.

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Selon eux, cette loi a officialisé “un régime d’apartheid”. Ils citent à ce sujet l’ancienne ministre de la Justice Ayelet Shaked, qui déclarait que “le sionisme ne doit pas – et cela n’adviendra pas – continuer à se soumettre à un système de droits individuels interprétés de manière universaliste”.

La critique du sionisme défendue par le collectif repose, selon ses membres, sur “un triple refus” : “refus que la destinée des juifs du monde soit d’émigrer en Israël, refus de l’assimilation de ces derniers à cet État et refus de son caractère ethnico-religieux”.

En conclusion, les auteurs affirment que “combattre l’antisémitisme ne passe pas par une approbation du sionisme”, mais par “la reconnaissance de droits égaux imprescriptibles pour tous les êtres humains” et par la défense des droits du peuple palestinien.

La tribune est notamment signée par Rony Brauman, Edgar Blaustein, Pierre Khalfa, ainsi que d’autres membres du Collectif Juives et Juifs pour les droits du peuple palestinien.

SOURCE:TRT français et agences