Cyril Ramaphosa, président de l'Afrique du Sud / Photo: Reuters (Reuters)

Une mission de paix menée par six dirigeants africains partira "dès que possible" à Kiev et à Moscou pour tenter de "trouver une solution pacifique" à la guerre en Ukraine sur laquelle les pays du continent n'ont pourtant pas affiché de position commune.

Les pays africains ont dénoncé moins unanimement que les grandes puissances occidentales l'invasion russe de l'Ukraine de février 2022. Le Sénégal et l'Afrique du Sud se sont notamment abstenus l'an dernier à l'ONU lors du vote d'une résolution condamnant Moscou. L'Erythrée a voté contre, tandis que Kenya et Rwanda se rangeaient du côté occidental.

Proche du Kremlin depuis l'époque de la lutte contre l'apartheid et puissance influente sur le continent, l'Afrique du Sud a refusé de condamner la Russie depuis le début du conflit, affirmant rester "neutre" et vouloir privilégier le dialogue. Une position qui a irrité sur la scène internationale.

Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky ont "accepté de recevoir la mission et les chefs d'Etat africains, à Moscou et à Kiev", a déclaré M. Ramaphosa lors d'une conférence de presse au Cap.

"J'ai convenu avec le président Poutine et le président Zelensky de lancer les préparatifs avec les chefs d'Etat africains", a-t-il poursuivi, précisant s'être entretenu au cours du weekend avec ses homologues russe et ukrainien lors d'"appels téléphoniques séparés".

Les détails et le calendrier de la mission n'ont pas été précisés. Mais "la réussite ou l'échec de cette initiative dépendra des discussions qui auront lieu", a souligné Cyril Ramaphosa, disant espérer "des échanges soutenus".

"Compétition entre puissances"

La veille, le chef d'Etat sud-africain s'était indigné que Pretoria subisse des "pressions extraordinaires" pour choisir son camp, après de récentes tensions avec Washington autour de la question russe. Il a affirmé que l'Afrique du Sud ne se laissera pas entraîner "dans une compétition entre puissances mondiales".

L'ambassadeur américain à Pretoria s'était indigné la semaine dernière qu'un cargo russe ait accosté en décembre près du Cap, l'accusant d'être reparti vers la Russie chargé d'armes et de munitions.

Le gouvernement sud-africain a déclaré qu'il n'existait aucune trace de ventes d'armes approuvées par l'Etat à la Russie sur la période en question et M. Ramaphosa a annoncé l'ouverture d'une enquête sur l'affaire.

Visiblement courroucée, la ministre de la Défense, Thandi Modise, a déclaré au quotidien Mail & Guardian: "Nous n'avons rien envoyé du tout à la Russie, même pas un morceau de Chappies" (marque locale de chewing-gum).

"Je n'en peux plus qu'on nous parle des Etats-Unis", a-t-elle ajouté, "je ne sais pas combien de fois nous devrons répéter que nous sommes pour la paix".

Des interrogations persistent depuis des mois sur le degré de proximité de Pretoria avec la Russie.

Lundi, le chef de l'armée de terre sud-africaine s'est rendu à Moscou pour discuter de coopération militaire. L'accueil par l'Afrique du Sud en février d'exercices navals avec la Russie et la Chine, peu avant le premier anniversaire de l'invasion russe, avaient déjà suscité les inquiétudes occidentales.

La mission africaine sera la dernière d'une série d'efforts diplomatiques, qui n'ont pas abouti jusqu'à présent, vers un plan de paix en Ukraine.

Un envoyé spécial chinois est attendu cette semaine à Kiev pour promouvoir les négociations de paix menées par Pékin.

Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, "a accueilli favorablement" le projet de mission africaine, a affirmé Cyril Ramaphosa.

M. Guterres a toutefois estimé la semaine dernière que les négociations de paix n'étaient "pas possibles en ce moment", les deux parties étant "convaincues qu'elles peuvent gagner".

Selon M. Ramaphosa encore, Washington et Londres ont apporté un soutien "prudent" à la mission africaine.

AFP