Le président français, Emmanuel Macron avec le chef de l’État ukrainien, Volodymyr Zelensky. (Others)

Qu’est-ce qui a bien pris le chef de l’État français le 26 février dernier ? Beaucoup d’observateurs français se posent encore la question. En plein sommet consacré à l’Ukraine à Paris, Emmanuel Macron a pris tout le monde de court en suggérant pour la première fois l’éventualité de l’envoi de troupes françaises au sol en Ukraine.

“Il n’y a pas de consensus aujourd’hui pour envoyer de manière officielle, assumer et endosser des troupes au sol. Mais en dynamique, rien ne doit être exclu “, d’après le chef de l’État français qui précise : “Tout est possible si c’est utile pour atteindre notre objectif“.

Un enthousiasme qui, paradoxalement, contraste avec une baisse d’engouement des principaux alliés ukrainiens, deux ans après le début du conflit.

Les États-Unis, leaders au sein de l’OTAN, ont cessé de livrer des armes à l’Ukraine depuis le début de l’année alors que Kiev attend toujours les 60 milliards d’aide américaine pour continuer à huiler sa machine de guerre.

Pis, Si l’ancien président américain Donald Trump retourne à la Maison-Blanche, les Américains pourraient stopper leur soutien à l'Ukraine et reconsidérer leur participation dans l’OTAN, d’après les propos du Premier-ministre hongrois, Victor Orban, qui s’exprimait le 8 mars, à l’issue d’une audience avec le leader républicain.

"Il est évident que l'Ukraine ne peut pas tenir debout toute seule". "Si les Américains ne donnent pas d'argent ni d'armes, ainsi que les Européens, cette guerre sera terminée. Et si les Américains ne donnent pas d'argent, les Européens sont incapables de financer cette guerre par leurs propres moyens, et alors la guerre prendra fin", a-t-il poursuivi.

Dans ce contexte de doute, comment comprendre Emmanuel Macron, alors que ses propos ont suscité un tollé parmi les principaux membres de l’Otan. L'Allemagne, la Pologne, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Otan de manière générale, sont opposés à l’envoi de troupes sur le terrain. Ils y voient un grand risque face à une puissance nucléaire. Les déclarations du président français suscitent davantage d’interrogations et sèment le flou.

En France, l’homme politique et intellectuel de droite Pierre Lellouche soupçonne Emmanuel Macron de se servir de la guerre en Ukraine pour détourner l’attention du public sur une situation intérieure difficile.

Dans une tribune parue dans Le Figaro, il s’est posé une série de questions.

“ (...) S’agit-il, plus trivialement, de détourner l’attention d’une situation intérieure détestable, comme chacun a pu le constater le week-end précédent au Salon de l’agriculture ?(…)Ou bien s’agit-il encore d’un calcul délibéré : profiter du vide de leadership en Europe et des incertitudes à Washington, pour tenter de prendre la direction sinon du monde occidental, du moins de l’Europe, dans un combat devenu quasi-civilisationnel avec la Russie ?”

Contradictions

Toujours est-il que le chef de l’État français semble familier des coups d’éclats, des effets d’annonce internationaux, sans lendemain, fait remarquer par ailleurs Pierre Lellouche.

Il rappelle à cet effet la proposition d’Emmanuel Macron à Tel Aviv, en réaction à l'opération du Hamas du 7 octobre dernier. Le chef de l’État français proposait alors au premier ministre Benjamin Netanyahu d’étendre la coalition internationale anti-Daesh à la lutte contre le Hamas. Une proposition sans lendemain.

Si la guerre russo-ukrainienne envenime les relations entre Paris et Moscou, le business des substances stratégiques comme l’uranium n’est pas perturbé.

La France continue d’acheter de l’uranium transformé à l’entreprise d’État russe, Rosatom. D’après les révélations du journal en ligne Mediapart l’ancienne ministre de l’Energie, Agnès Pannier-Runacher, l’a confirmé devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, lors de l’examen de la loi d’accélération du nucléaire, en mars 2023. “EDF est liée par contrat avec une entreprise russe et la non-exécution de ce contrat apporterait plus d’argent à la Russie que son exécution minimale, avait-elle expliqué. Nous ne sommes pas idiots : nous donnons le minimum d’argent à la Russie. C’est aussi simple que cela”.

En 2023, les importations françaises en Russie ont représenté l’équivalent d’un peu moins d’un tiers de la quantité d’uranium enrichi nécessaire à faire tourner ses 56 réacteurs, autour de 223 tonnes. L’Ukraine est au courant de cette relation commerciale, mais n’y peut pas grand-chose, en dehors “d’amicales protestations”.


TRT Français et agences