Une vue partielle de la ville de Lalibela dans la région d'Amhara. / Photo: Reuters (Reuters)

Cette escalade de violence vient menacer le fragile équilibre dans la partie septentrionale du deuxième pays le plus peuplé d'Afrique, à peine neuf mois après la fin d'un conflit dévastateur dans la région voisine du Tigré.

"Il est devenu nécessaire de déclarer l'état d'urgence car une situation a émergé et il est devenu difficile de contrôler ce mouvement inacceptable avec la loi actuelle", a annoncé un communiqué du bureau du Premier ministre Abiy Ahmed.

Le texte ne précise pas si cet "état d'urgence" s'applique à la seule région ou à l'ensemble du pays. Le gouvernement n'a pas répondu dans l'immédiat aux demandes de précisions de l'AFP.

La décision a été prise "à l'unanimité" lors d'une réunion du conseil des ministres durant laquelle a été évoquée la situation en Amhara, où "un niveau élevé de dommages se produit (...) en raison des attaques menées par des groupes extrémistes armés", précise le communiqué.

"Le danger que représente le mouvement (de violence) pour la sécurité du pays et de la population augmente de jour en jour. Le gouvernement a lancé des appels répétés à la paix pour que toutes les forces qui ont pris les armes adoptent une voie pacifique et légale", ajoute-t-il.

Jeudi soir, les autorités régionales amhara ont appelé le gouvernement fédéral à prendre des "mesures" pour restaurer la sécurité, évoquant une situation "difficile à contrôler" .

Vols suspendus

Ces dernières semaines, divers affrontements armés ont opposé l'armée et des combattants de milices locales dans une dangereuse escalade de violence. Ces deux forces avaient été alliées durant les deux ans de guerre dans la région voisine du Tigré, entre novembre 2020 et novembre 2022.

Les tensions dans la région ont débuté après que le gouvernement eut annoncé mi-avril vouloir démanteler les "forces spéciales", des unités paramilitaires créées par de nombreux États régionaux depuis une quinzaine d'années. Les nationalistes amhara estiment que le gouvernement veut affaiblir leur région.

Jeudi, la compagnie Ethiopian Airlines a indiqué avoir suspendu ses vols vers deux importantes villes amhara, Gondar et Lalibela, sans en détailler les raisons.

Dans cette dernière localité, réputée pour ses églises taillées dans le roc classées au patrimoine mondial de l'Unesco, plusieurs sources ont affirmé que des combattants de la milice nationaliste amhara Fano s'étaient emparés de l'aéroport.

Des combats entre miliciens Fano et forces gouvernementales ont eu lieu jeudi à la périphérie de la ville, selon un habitant.

Plusieurs ambassades occidentales, notamment de Grande-Bretagne et d'Espagne, ont recommandé ces derniers jours à leurs ressortissants de ne pas se rendre dans la région en raison de la "violence" et de "l'instabilité" qui y règne.

Litiges frontaliers

Les "forces spéciales" amhara, épaulées par les milices Fano, ont apporté une aide cruciale à l'armée fédérale durant les deux ans de conflit qu'elle a mené contre les autorités dissidentes de la région du Tigré, voisine de l'Amhara.

Un accord de paix a mis fin en novembre 2022 à cette guerre, mais le texte mécontente une large partie de la communauté amhara, la deuxième en nombre du pays.

Des litiges frontaliers opposent depuis des années les Amhara au parti au pouvoir au Tigré, le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF).

Forces spéciales amhara et Fano occupent notamment depuis le conflit le Tigré occidental, zone administrativement rattachée au Tigré mais revendiquée par les Amhara et dont le TPLF réclame la restitution aux termes de l'accord de paix.

Deuxième peuple d’Éthiopie en nombre, les Amhara en ont longtemps constitué l'élite politique et économique. Ils considèrent leur région comme le berceau historique de l’Éthiopie actuelle, que l'empereur - amhara - Tewodros II a contribué à unifier. Leur langue, l'amharique, est la langue nationale.

AFP