Une courbe de l'inflation qui commence enfin à s'aplanir, une opposition républicaine étalant ses dissensions au grand jour... Ces dernières semaines, les voyants étaient au vert pour le président démocrate, qui a gagné 7 points de popularité en 7 mois.
Jusqu'à ce qu'il commence à être question de ses archives et de Corvette.
Cette pratique est contraire à une loi de 1978 qui exige que tous les documents de travail de la Maison Blanche soient transmis aux Archives nationales en fin de mandat, et potentiellement à une autre, sur la sécurité, qui oblige à stocker les dossiers classifiés dans des endroits sûrs.
Embarras démocrate
Pour Allan Lichtman, professeur à l'American University, nul doute que cette affaire écorne l'image du président, qui a promis de lever le mystère sur une éventuelle candidature en début d'année. "La seule question, c'est à quel point".
L'affaire fait d'autant plus mal que son prédécesseur est lui aussi dans le viseur de la justice pour avoir emporté des caisses de documents en quittant la Maison Blanche. Une attitude qualifiée d'"irresponsable" par Joe Biden à l'automne.
Dans les rangs démocrates, où l'on fait front uni autour du président, cette situation provoque un certain embarras.
"Tout manquement aux protocoles de sécurité concernant le stockage et le traitement d'informations classifiées est évidemment une affaire sérieuse", a affirmé l'élu Jamie Raskin dans un communiqué.
L'opposition républicaine s'est quant à elle empressée de dénoncer les agissements du dirigeant démocrate, rebondissant sur une question lancée à Joe Biden par un journaliste de la chaîne prisée des conservateurs Fox News, suggérant qu'il aurait pu avoir laissé ces documents à côté de sa voiture préférée, une Corvette.
"Le président Biden protège mieux sa CORVETTE que des documents CONFIDENTIELS", a critiqué vendredi l'élu républicain Buddy Carter, juste avant que ses collègues n'annoncent l'ouverture d'une enquête au Congrès sur ce dossier.
Fort de leur nouvelle majorité à la Chambre des représentants, les républicains comptent bien exploiter toute potentielle faille démocrate, avec la présidentielle de 2024 en ligne de mire.
Leur marge de manoeuvre est pour autant limitée: le "Grand Old Party" peut difficilement attaquer Joe Biden sans incriminer davantage l'ancien président Donald Trump.
"Très au sérieux"
L'administration Biden les a déjà privés de l'argument d'une justice à double vitesse en nommant un procureur spécial, chargé d'enquêter sur ce dossier.
Joe Biden tente en même temps de saper tout parallèle entre son affaire et celle de son prédécesseur, déjà candidat, et de plaider la simple erreur.
"Le président prend cette affaire très, très au sérieux", a assuré sa porte-parole Karine Jean Pierre, sur la défensive vendredi face aux questions répétées de journalistes.
Pour Wendy Schiller, professeure en science politique à l'université Brown, l'impact de cette enquête sur l'avenir politique du démocrate dépendra "beaucoup de la façon dont l'administration Biden communique à ce sujet".
Mais cela ne devrait, pas bouleverser les projets de candidature de l'octogénaire -- si tant est qu'ils existent, estime Mme Schiller.
"Je pense que Biden ira de l'avant et se déclarera candidat après son discours sur l'état de l'Union", prédit l'experte. Ce grand discours de politique générale, donné devant les parlementaires américains le 7 février, sera l'occasion pour le président de tenter de recentrer les débats autour de son bilan législatif.
"Les Américains sont déjà si cyniques à l'égard de leur classe politique", souligne par ailleurs la politologue Lara Brown, que "ce scandale pourrait simplement se fondre dans un brouhaha perpétuel".