Un décret approuvé tard mercredi soir par le conseil des ministres et dont Reuters a pu consulter une copie, impose aux navires de demander immédiatement un port de débarquement vers lequel ils devront se diriger "sans délai" après une intervention de secours, plutôt que de rester en mer pour secourir les occupants d'autres embarcations en danger comme c'est actuellement le cas.
Les missions de sauvetage des ONG opérant dans la Méditerranée durent généralement plusieurs jours, les navires enchaînant plusieurs opérations de sauvetage et accueillant souvent des centaines de personnes à bord.
Le nouveau décret adopté par les autorités italiennes impose également à l'équipage des navires de sauvetage d'informer les migrants qu'ils accueillent à bord de leur possibilité de demander la protection internationale dans n'importe quel pays de l'Union européenne et pas seulement dans le pays de débarquement.
Aux termes de ce décret, les capitaines violant ces règles s'exposent à des amendes allant jusqu'à 50.000 euros et des infractions répétées peuvent être sanctionnées d'une immobilisation du navire.
Depuis sa nomination en octobre à la présidence du Conseil italien, la dirigeante du parti d'extrême droite Fratelli d'Italia, Giorgia Meloni, et son gouvernement ont adopté une politique sévère à l'égard des ONG de sauvetage de migrants en mer, accusées de faire le lit des passeurs et des trafiquants ou d'encourager les migrants à tenter la traversée, ce que les associations contestent.
Riccardo Gatti, chef de l'équipe de recherche et de sauvetage à bord du Geo Barents, navire affrété par Médecins sans frontières (MSF), a jugé dans un entretien publié jeudi par La Repubblica que ce décret s'inscrivait dans une stratégie qui "augmente le risque de décès pour des milliers de personnes".
Aux yeux de ce responsable, ces nouvelles règles visant à empêcher des sauvetages multiples bafouent le droit international, en plus d'être "éthiquement inacceptables".
La question de la politique migratoire fait l'objet de débats récurrents au sein de l'Union européenne (UE), les pays en première ligne - comme l'Italie, l'Espagne ou encore la Grèce - appelant régulièrement les Vingt-Sept à davantage de solidarité.
Cette question, qui avait déjà déclenché une crise diplomatique entre la France et l'Italie en 2018, lorsque Matteo Salvini, chef de La Ligue (extrême droite) était ministre de l'Intérieur, a de nouveau fait l'objet d'une passe d'armes entre Paris et Rome , lorsque le gouvernement italien a refusé d'accueillir dans ses ports l'Ocean Viking, le navire de l'ONG SOS Méditerranée, qui a finalement accosté dans la rade de Toulon (Var).