Manifestations à Paris, jeudi 23 mars / Photo: Reuters (Reuters)

Entrée dans son troisième mois, la contestation dans la rue a rassemblé jeudi entre 1,089 million de manifestants (ministère de l'Intérieur) et 3,5 millions (syndicat CGT) pour la 9e journée de mobilisation.

Le 49.3, article controversé de la Constitution française dégainé par le gouvernement pour faire passer en force à l'Assemblée sa réforme des retraites, et l'intervention mercredi du président de la République Emmanuel Macron n'ont pas refroidi les ardeurs des opposants.

"On sent qu'il y a un élan extrêmement fort de la population, une opinion publique qui est largement convaincue et donc voilà, tant qu'il y a un calendrier qui nous permet d'agir, on est mobilisé", a commenté Marylise Léon, numéro deux du syndicat CFDT.

Les syndicats ont donné à nouveau rendez-vous mardi aux manifestants et grévistes, et des rassemblements de proximité sont prévus ce week-end. Rassurés par les chiffres de la mobilisation, ils ont été aussi ragaillardis par des cortèges où les jeunes sont manifestement venus plus nombreux.

La violence, qui n'avait jusqu'ici été que sporadique, a également fait une entrée en scène spectaculaire dans le jeu entre le gouvernement et les syndicats.

Porte de la mairie de Bordeaux (sud-ouest) incendiée, "scènes de chaos" dénoncées par la maire de Rennes (ouest), canons à eau à Lille (nord) et Toulouse (sud-ouest), manifestante avec un pouce arraché à Rouen (nord-ouest), commissariat pris pour cible à Lorient (ouest) etc. Les violences sont montées d'un cran presque partout. "Inacceptables", a jugé la Première ministre Elisabeth Borne.

Pas de porte de sortie

A Paris, des violences ont éclaté en tête de la manifestation avec leur lot de vitrines brisées et de mobilier urbain détruit, et des incidents se sont poursuivis en soirée dans le sillage de cortèges dits "sauvages". A rebours d'un défilé où la grande majorité des manifestants a marché pacifiquement.

Feux de poubelle, sirènes et gyrophares ont strié une nuit où des grappes de manifestants ont joué au chat et à la souris avec les forces de l'ordre.

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a fait état de 172 interpellations en France, et de 149 blessés dans les rangs des forces de l'ordre, selon un bilan provisoire donné vers 22H00 (21H00 GMT). La préfecture de police de Paris a fait état de 103 personnes interpellées dans la capitale.

"La stratégie de l'exécutif, "c'est une stratégie minoritaire de faire pourrir un mouvement social et de faire peur aux gens en employant la violence, et j'ose parler de violences policières", selon Catherine Perret, secrétaire confédérale du syndicat CGT.

Des manifestations d'écologistes prévues ce week-end dans l'ouest du pays et la venue du roi Charles III la semaine prochaine en France en pleine crise sociale promettent en tout cas un sacré défi pour un exécutif décidé à jouer l'ordre.

Le gouvernement reste inflexible sur sa réforme. Emmanuel Macron, qui était jeudi à Bruxelles pour un sommet européen, avait la veille défendu bec et ongles une réforme "nécessaire" pour les finances publiques, assumant son "impopularité".

A l'issue de ce nouvel épisode d'un conflit dont aucun camp ne semble chercher une sortie, les responsables politiques de gauche ont invité jeudi les Français à amplifier encore la contestation contre la réforme des retraites.

Le secrétaire national du Parti communiste français Fabien Roussel a appelé à "mettre le pays à l'arrêt", et le leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon à "jeter toutes les forces dans la bataille".

Pour la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen, finaliste malheureuse de la dernière présidentielle, "Emmanuel Macron ne peut plus gouverner seul, il doit désormais en revenir au peuple".

TRT Français et agences