Giorgia Meloni, grande favorite des législatives italiennes de dimanche (Others)

A la tête de Fratelli d'Italia ("Frères d'Italie"), Giorgia Meloni est désormais aux portes du Palais Chigi alors que son parti avait récolté à peine 4% des voix en 2018, bien loin des 25% dont elle est créditée par les instituts d'opinion à quatre jours du scrutin.

"Il y a dans l'air cette idée que nous avons essayé tous les autres, alors essayons avec elle, cette fois", commente Wolfango Piccoli, qui copréside Teneo, un cabinet de conseil en risque politique.

Et si elle arrive au pouvoir, ce ne sera pas sans l'appui de ses alliés Forza Italia ("Allez l'Italie") de Silvio Berlusconi et la Ligue de Matteo Salvini, des mouvements avec lesquels des divergences sont apparues au cours de la campagne.

Giorgia Meloni devra le cas échéant composer avec une situation politique difficile, qu'il s'agisse de l'envolée des coûts de l'énergie, de la dette publique, du risque de récession ou des retombées du conflit en Ukraine.

Mais elle devra également s'asseoir à la place jusque-là occupée par Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne et figure internationalement reconnue, qui a décidé de quitter ses fonctions, lassé de devoir composer avec une coalition gouvernementale hétéroclite.

Romaine, âgée de 45 ans, Giorgia Meloni a essentiellement axé sa campagne sur la lutte contre l'immigration et sur la baisse des impôts et peut se targuer de n'avoir pas embarqué sa formation politique dans l'alliance emmenée par Mario Draghi, ce qui lui confère une virginité politique à laquelle les autres formations ne peuvent prétendre.

"Meloni est une excellente communicante mais elle doit faire face à des contraintes économiques et n'a pas beaucoup d'expérience. Son état de grâce ne durera pas longtemps", prédit Wolfango Piccoli.

INCERTITUDES

Giorgia Meloni pourrait également devoir surmonter un écueil imprévu et se retrouver avec une majorité plus étriquée que pressenti, voire sans majorité du tout ce qui prolongerait la période d'instabilité que connaît l'Italie à intervalles réguliers depuis des décennies.

Il y a dix jours à peine, le bloc conservateur, qui comprend Fratelli d'Italia, la Ligue et Forza Italia, était crédité de 45% des suffrages, de quoi lui garantir plus de 60% des sièges à la Chambre des députés.

Depuis quelques jours, pourtant, le doute affleure et la Ligue dirigée par Matteo Salvini, sans cesse attaquée pour ses liens étroits avec Vladimir Poutine, marque le pas tandis que les populistes du Mouvement 5 Etoiles (M5S) se redressent.

Une autre source d'incertitudes réside dans les conséquences de la réforme électorale qui a réduit le nombre de députés de 630 à 400 et celui des sénateurs de 315 à 200.

"L'un des effets de la réduction du nombre de sièges au Sénat, c'est qu'il s'en faut de peu pour passer d'une majorité écrasante à une majorité plus étroite", souligne Lorenzo Pregliasco, qui dirige l'institut de sondage YouTrend.

CAMPAGNE TERNE

Le scrutin de dimanche viendra clore une campagne électorale singulière et plutôt terne qui n'aura pas soulevé l'enthousiasme des Italiens, à qui aucun débat télévisé n'a été proposé.

Le bloc conservateur a pioché dans ses vieilles promesses de campagne, s'engageant à réduire les impôts, abaisser l'âge de départ à la retraite et lutter contre l'immigration clandestine en empêchant par tous les moyens les migrants de gagner l'Italie à partir de l'Afrique du Nord. Giorgia Meloni a sur ce point proposé d'instaurer un blocus naval pour empêcher les embarcations de migrants de prendre la mer.

Cette suggestion a été balayée par ses adversaires, convaincus qu'elle serait illégale et impossible à mettre en pratique.

Le M5S s'est quant à lui engagé à préserver le système de protection sociale en faveur des moins aisés, une promesse qui a eu un écho non-négligeable dans le Sud, réputé plus pauvre, et cible ces derniers jours des assauts de tous les partis.

Face à Giorgia Meloni, le Parti démocrate, de centre-gauche, s'efforce de la présenter comme l'héritière du néofascisme et de mettre en cause sa proximité avec le Premier ministre hongrois Viktor Orban.

Soucieuse de se défaire de cette étiquette qui lui colle à la peau depuis son adolescence, elle militait alors dans les rangs du Mouvement social italien (néofasciste), Giorgia Meloni compare plus volontiers son parti aux Tories britanniques et se démarque nettement de Matteo Salvini en soutenant l'Ukraine dans sa guerre contre la Russie.

Ces nuances ne l'ont pas empêchée de soigner l'aile la plus à droite de son électorat. "Je rêve d'une nation dans laquelle ceux qui ont dû faire profil bas pendant des années, feindre d'avoir d'autres idées, ne soient plus ostracisés, qu'ils puissent dire ce qu'ils pensent", a-t-elle dit lors d’un rassemblement.

Les bureaux de vote ouvriront dimanche à 7h00 (5h00 GMT) et fermeront à 23h00. Les résultats complets ne sont pas attendus avant lundi matin.

Reuters