France: le ministre de la Justice renvoyé en procès pour conflit d'intérêt (Reuters)

C’est une première pour un garde des Sceaux en exercice en France. Ses avocats ont immédiatement annoncé se pourvoir en cassation.

"Comme malheureusement nous nous y attendions, c'est un arrêt de renvoi qui a été rendu par la commission de l'instruction (ndlr: de la CJR). Nous avons immédiatement formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt. Cet arrêt n'existe plus", ont annoncé Me Christophe Ingrain et Rémi Lorrain à la sortie de la CJR, à Paris, en l'absence du ministre de la Justice.

"Il appartient désormais à l'assemblée plénière de la Cour de cassation de se saisir de ce dossier et de se prononcer notamment sur les nombreuses irrégularités qui ont émaillé ce dossier depuis deux ans au premier rang desquels figure le positionnement atypique puisque déloyal et partial du procureur général près la Cour de cassation", François Molins, a ajouté Me Rémi Lorrain.

Son renvoi ne manquera pas de poser une nouvelle fois la question du maintien au gouvernement de l'ancien pénaliste.

"J'ai toujours dit que je tenais ma légitimité du président de la République et de la Première ministre et d'eux seulement", avait-il déclaré mardi.

Arrivés à neuf heures à la CJR, dont la formation de jugement est seule habilitée à juger les membres du gouvernement pour des crimes ou délits commis dans l'exercice de leur mandat, les deux avocats en sont ressortis trente minutes plus tard, après s'être faits signifier le renvoi pour "prises illégales d'intérêts" d'Eric Dupond-Moretti.

L'ancien ténor du barreau, nommé à la tête de la Chancellerie à l'été 2020 et reconduit à ce poste après la réélection en mai d'Emmanuel Macron, a été mis en examen par la CJR en juillet 2021.

Eric Dupond-Moretti est accusé d'avoir profité de sa fonction, une fois à la tête du ministère de la Justice, pour régler ses comptes avec des magistrats avec lesquels il avait eu maille à partir lorsqu'il était avocat, ce qu'il conteste.

Des plaintes de syndicats de magistrats et de l'association anticorruption Anticor, dénonçant deux situations de conflit d'intérêt depuis son arrivée à la Chancellerie, avaient donné lieu à l'ouverture d'une information judiciaire en janvier 2021.

AFP