Alors que les multiples crises mondiales (Covid-19, guerre en Ukraine, etc.) renforcent le stress énergétique tant dans les pays que dans les ménages, de plus en plus de pays comme l’Arabie Saoudite se lancent dans des projets de villes intelligentes et durables en vue de répondre aux besoins de leur peuple en matière d’énergie.
En France également, les ministères, les collectivités territoriales, les villes, les grandes entreprises ainsi que les chercheurs universitaires et experts tentent de penser la ville de demain pour faire face à de nombreux défis, notamment celui des nouvelles technologies, et permettre, ainsi, de prendre de meilleures décisions sur le plan énergétique.
Pour Frédéric Babonneau, spécialiste des questions d’énergie, la mobilité constitue un des grands défis pour les métropoles. En effet, affirme cet expert dans un entretien avec TRT Français,“elles vont devoir, par exemple, faire face à une évolution de la mobilité. On sait tous que la mobilité sera électrique demain et les problématiques qui en découlent seront nombreuses : 1) Comment organiser cette mobilité de demain et où installer les bornes de recharge ? 2) Quel modèle mettre en place pour permettre aux usagers d'avoir accès à ces bornes de recharge ? 3) Quel système de tarification sera mis en place ? 4) Est-ce qu'on met la tarification au kilowattheure consommé ou alors au temps connecté dans les différentes bornes de recharge ?”
Ces questions sont aussi importantes que celle des livraisons des produits dans les centres villes au vu de l’explosion actuelle des livraisons de colis, voire de repas, dans les métropoles. Elles sont aujourd’hui divisées en grandes zones : zone industrielle, zone commerciale, centre-ville, zone périurbaine, etc. Dès lors, comment penser la communication, le transport et les interactions entre ces zones dans une perspective durable et intelligente ?
Le concept de ville intelligente
On connaît bien la définition d’une ville durable mais beaucoup moins celle de ville intelligente. Pour Babonneau, il s’agit d’un "concept assez large et global qui va s'appuyer à la fois sur l'innovation et les technologies intelligentes. Elles vont pouvoir collecter de l'information, des données à travers des capteurs et des caméras. Ensuite, on va utiliser ces données et ces informations pour améliorer les services aux citoyens. Ainsi, on observe des applications très concrètes au niveau de la sécurité et de la santé mais aussi au niveau de l'énergie.”
Les métropoles vont pouvoir ainsi rationnaliser et optimiser l'énergie, donc minimiser la consommation. Dans ce domaine, il y a le concept de “smart grid” dit "réseaux électriques intelligents" en français. Les smart grids désignent de nouveaux réseaux de distribution de l’électricité ayant pour principale caractéristique une capacité à ajuster le flux d’électricité aux différents besoins en temps réel.
L’universitaire rappelle qu’en France, le concept est déjà appliqué et le sera davantage à l’avenir “ le gouvernement est en train de nous préparer à des coupures d'électricité sur certaines régions, zones ou périodes. Il y aura du stress sur la consommation d'énergie. Avec ces technologies intelligentes et l'accès aux données, on va pouvoir couper certains appareils électroménagers des usagers sans qu'on ne s'en rende compte. On va couper ces appareils un instant, dix minutes, une demi-heure et puis ça va permettre de stabiliser le réseau et d'éviter un peu ces moments de tension sur le réseau.”
Sans aucun doute, une utilité sur le plan énergétique mais qui ne manquera pas de soulever des questions éthiques et de liberté, notamment en Europe.
De grands projets au Moyen-Orient
S’il y a bien une autre région du monde qui ne se pose pas ce genre de questions et en étant plus pragmatique que l’Europe, c’est bien le Moyen-Orient. Le Moyen-Orient a mis et projette de mettre en place de nombreuses villes durables et intelligentes comme Masdar aux Emirats Arabes Unis, The Line et Neom en Arabie Saoudite ou encore à Oman et au Qatar. Pour Babonneau, nonobstant les interrogations sur la rentabilité économique et l’efficacité énergétique de ces projets, il estime qu’ils sont pertinents et qu’ils permettent de gagner en expertise.
“Ici, on est en plein dans les technologies intelligentes, ce qu'on appelle les systèmes énergétiques intelligents, on arrive à développer des technologies et de nouvelles idées qui permettent de réduire considérablement notre empreinte, notre consommation énergétique et notre empreinte carbone. J'ai eu la chance de me rendre à Masdar pour une conférence à l'Agence internationale pour les énergies renouvelables. Je me suis rendu aussi au Qatar qui a un autre concept de ville intelligente.”
Et si finalement le Moyen-Orient, en pensant et en expérimentant de manière concrète et avec des moyens colossaux la ville de demain, n’est-il pas en train de montrer la voie de la ville de demain, intelligente et durable, mettant au service de la civilisation humaine les idées les plus pertinentes ?