"La coalition présidentielle n'est pas assurée de conserver sa majorité absolue - dont le seuil est fixé à 289 sièges" (AFP)

Bousculé par la gauche dimanche au premier tour des élections législatives, Emmanuel Macron et son camp repartent en campagne pour tenter d'arracher une majorité absolue à l'Assemblée, indispensable pour avoir les coudées franches pour les cinq prochaines années.

"Il y a une bataille à mener pour le deuxième tour, il y a un travail de conviction à faire", a déclaré le ministre de la Fonction publique Stanislas Guérini, candidat à Paris.

Le camp Macron va cibler l'alliance de la gauche Nupes, qui va du parti socialiste à la gauche radicale. "J'ai peur pour mon pays", il y a "un boulevard à ceux qui, en se repeignant de vert et rose, sont des anarchistes d'extrême gauche", a déclaré la ministre de la Transition écologique Amélie de Montchalin.

Réelu fin avril face à l'extrême droite, le chef de l'Etat français sortant doit composer avec un panorama moins favorable qu'en 2017, avec, pour l'édition 2022, une abstention record et une double percée de la gauche et de l'extrême droite.

Emmenée par Jean-Luc Mélenchon, la Nupes a fait jeu quasi égal avec la majorité présidentielle sortante, réunie sous l'étiquette Ensemble ! et arrivée en tête avec seulement 21 .000 voix d'avance, sur les 23,3 millions de votants.

Si la coalition présidentielle conserve l'avantage dans les projections des 577 sièges de députés (255 à 295), devant la Nupes (150 à 210), elle n'est pas pour autant assurée à ce stade de conserver sa majorité absolue - dont le seuil est fixé à 289 sièges.

"La majorité est loin d'être acquise (...) C'est un très sérieux avertissement qui est adressé à Emmanuel Macron", prévient Brice Teinturier, directeur général délégué de l'institut de sondage Ipsos France.

Dans ce contexte, la semaine qui vient s'annonce donc cruciale pour le camp présidentiel qui va devoir tenter de maintenir la mobilisation de ses électeurs et convaincre ceux de droite de glisser un bulletin Ensemble! dans l'urne dimanche.

Présents sur les radios et TV lundi matin, les ténors du camp présidentiel ont assuré que "rien n'était joué", à l'image du ministre chargé des Comptes publics Gabriel Attal ou encore de la porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire.

La Première ministre Élisabeth Borne a prévu quant à elle de se rendre sur le terrain, dans la 6e circonscription du Calvados (nord-ouest) où elle est arrivée confortablement en tête au premier tour.

"Nous sommes la seule force politique en mesure d'obtenir la majorité à l'Assemblée nationale", a insisté la cheffe du gouvernement dimanche soir, s'alarmant d'"une confusion inédite entre les extrêmes".

Convaincre les abstentionnistes

L'absence de majorité absolue du camp présidentiel compliquerait la tâche de l'exécutif et serait une première depuis les législatives de 1988, lorsque les socialistes et leurs alliés n'étaient pas parvenus à obtenir une majorité absolue.

Le gouvernement de Michel Rocard avait alors dû faire des alliances avec le centre-droit pour faire voter ses textes, souvent à l'aide de l'article 49.3 de la Constitution.

Dans le camp de la Nupes, l'enjeu de la semaine sera de convaincre les électeurs de se déplacer jusqu'aux bureaux de vote dimanche, après l'abstention record enregistrée dimanche - moins d'un électeur sur deux s'est rendu aux urnes pour le premier tour.

"Le jeu est ouvert", a estimé la députée LFI Clémentine Autain lundi sur France inter, évoquant une "défaite assez cinglante pour le pouvoir en place".

"J'appelle solennellement ce matin celles et ceux qui nous écoutent à prendre la mesure du champ des possibles en une semaine", a-t-elle ajouté.

"Si vous ne voulez pas de cinq ans de Macron de plus, il y a suffisamment de centaines et de centaines de circonscriptions où la Nupes est au second tour, nous avons cette possibilité encore de gouverner".

S'exprimant quelques minutes plus tard sur la même radio, Gabriel Attal a insisté sur les différences entre les programmes des deux camps.

"Ce deuxième tour va permettre une clarification", a souligné le ministre des Comptes publics. "On porte un projet qui est profondément républicain là où la Nupes, le Rassemblement national (extrême droite, ndlr), s'éloignent de la République, on porte un projet qui est profondément européen là où ils veulent in fine sortir de l'Union européenne".

Le camp présidentiel doit également composer avec certains ministres en ballotage défavorable face à la Nupes, à l'image d'Amélie de Montchalin (Transition écologique) ou de Clément Beaune (Affaires européennes).

Quant au RN, parti de Marine Le Pen, finaliste de la présidentielle le 24 avril, il est arrivé en troisième position avec environ 19% des voix, loin devant la droite traditionnelle qui devrait perdre son statut de premier groupe d'opposition.

Le parti d'extrême droite, qui a toujours été pénalisé par le mode de scrutin majoritaire aux législatives, pourrait réussir à dépasser les 15 députés, une première en France depuis plus de 35 ans.

AFP