Vives critiques après l’annulation d’un colloque sur la Palestine au Collège de France

L’annulation du colloque met en lumière les tensions entre indépendance scientifique et enjeux géopolitiques.

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Vives critiques après l’annulation d’un colloque sur la Palestine au Collège de France

France Universités, une association qui regroupe les dirigeants d’université, a exprimé son "incompréhension" et sa "vive inquiétude" face à une décision qui "porte atteinte à la liberté académique", selon elle. France Universités "a découvert avec stupeur l’annulation du colloque scientifique La Palestine et l’Europe : poids du passé et dynamiques contemporaines", a-t-elle annoncé dans un communiqué. "Les universités doivent pouvoir continuer, à l’abri de toutes formes de pressions extérieures, à promouvoir des débats éclairés par des travaux de recherche scientifique", a-t-elle estimé.

De son côté, Francesca Albanese, rapporteure spéciale de l’ONU pour la situation des droits humains dans les territoires occupés et faisant partie des invités du colloque, a vivement réagi.

 "La France, berceau des Lumières, étouffe aujourd’hui la liberté académique dès qu’elle éclaire la Palestine. Quelles qu’en soient les raisons -politiques, idéologiques- elle sacrifie ses principes à une croisade antipalestinienne aussi dangereuse qu'envahissante". a-t-elle écrit sur X. 

Indignation universitaire

Dans une lettre adressée à l’administrateur du Collège de France, Thomas Römer, rendue publique lundi, le sociologue et démographe François Héran, professeur honoraire au Collège de France, a protesté contre cette décision. "Je découvre que, loin d’être l’apanage du wokisme, la cancel culture peut aussi inspirer l’administration du Collège", a-t-il ironisé.

Le principal syndicat de l’enseignement supérieur, le Snesup, a, lui, estimé dans un communiqué que ce colloque devait "impérativement se tenir". "Faisant l’objet de pressions pour obtenir son annulation, le ministre de l’Enseignement supérieur (…) a choisi de céder."

Réactions politiques

A gauche, plusieurs élus de La France insoumise (LFI) ont critiqué cette annulation, et la cheffe de ses députés, Mathilde Panot, a écrit une lettre à l’administrateur du Collège de France pour lui proposer "d’organiser ce colloque dans l’enceinte de l’Assemblée nationale". 

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, avait estimé, dimanche, "inadmissible" cette annulation "après intervention du ministre de l’enseignement supérieur".

Le Collège de France a annulé, dimanche même, ce colloque qui devait se tenir de jeudi à vendredi, coorganisé par l’historien Henry Laurens et le Centre arabe de recherches et d’études politiques de Paris (Carep Paris).

La conférence devait réunir, sous l’égide de son comité scientifique, une palette de figures européennes venues d’universités et d’écoles européennes reconnues, telles que l’Inalco, l’école polytechnique de Lausanne, le King’s College, SOAS à Londres ou l’Université libre de Bruxelles. Parmi les intervenants invités à clore les deux journées scientifiques figurent Francesca Albanese, rapporteure spéciale de l’ONU pour la situation des droits humains dans les territoires occupés, Josep Borrell, ancien Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et Dominique de Villepin, ancien Premier ministre français et ministre des Affaires étrangères. Un panel de haut niveau à la hauteur des enjeux en cours au Moyen-Orient sur lequel le ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Philippe Baptiste, a eu le dernier mot en le faisant tout bonnement annuler.