Noël Le Graët, un départ attendu mais forcé
Auteur de propos désinvoltes envers Zinedine Zidane et accusé de plusieurs faits de harcèlement sexuel, Noël Le Graët a été mis en retrait par le Comex de la FFF. Pourquoi la Fédération était dans l’obligation d'appliquer une telle sanction ?
Noel Le Graet, FFF (Others)

Une sortie déplacée sur Zinedine Zidane, et s’en est trop pour le football français. Désormais ancien patron de la FFF, Noël Le Graët est mis en retrait de la présidence de la Fédération française de football par le Comité exécutif extraordinaire de l'instance depuis mercredi.

Si de nombreux témoignages et accusations de harcèlement sexuel, notamment sur mineur, ont fleuri ces derniers mois contre lui, c’est bien sa récente déclaration irrespectueuse sur Zidane qui lui vaut ce retrait forcé jusqu’à la publication du fameux audit lancé par le ministère des Sports sur le management de la Fédération française de football en septembre dernier.


Zinedine Zidane, champion du monde 98 et idole de toute une génération par son élégance et son talent sur les terrains, n’avait jamais été injustement offensé sur la place publique. Les soutiens à son égard n’ont pas tardé et ont germé par milliers sur les réseaux sociaux, provenant à la fois des célébrités que des supporters. Alors que ZZ, d’origine algérienne, a fait rayonner l’image de la France dans le monde entier, les journaux étrangers n’ont pas manqué de le soutenir également. Les excuses de Noël Le Graët resteront anecdotiques...

Une FFF trop souvent sous le feu des critiques

En se cachant derrière les résultats sportifs de l’équipe de France, Noël Le Graët et son équipe vivaient presque impunément au sommet de la fédération la plus importante de France depuis plus de 12 ans. Mais depuis le dossier de So Foot publié le 8 septembre, et une série de vidéos et d’enquêtes du journaliste indépendant Romain Molina, les habitudes sombres du président FFF ont alerté la planète football dans l'hexagone.

Ces travaux ont notamment relevé des messages à caractère sexuel de la part de l’ex-président à ses collaboratrices, du sexisme et des problèmes d’alcool importants. Selon le magazine, le sexisme est “élevé au rang d’art” à la FFF, à tel point que plusieurs femmes ont démissionné ces dernières années car elles se sentaient “harcelées sexuellement, mais aussi moralement” au sein de l’instance.

Florence Hardouin, directrice générale de la 3F, qui a également été mise en retrait de son poste, avait lancé un plan de sauvegarde de l’emploi, qui s’est avéré très douloureux pour la fédération, puisque 18 salariés historiques se sont retrouvés sans emploi, rappelait RMC Sport. Pire encore, l’un des salariés affirmait en utilisant les mots de la dirigeante, que sa priorité (à Hardouin) était de “virer des gens qui sont payés à ne rien foutre”, en particulier “les nanas qui restent chez elles à garder leurs enfants et nous font croire qu’elles télétravaillent”.

L’élément fort de l’enquête publiée par So Foot, qui résume bien le fonctionnement des comités de directions, est la phrase choc d’Éric Latronico qui a beaucoup fait réagir en interne : ”C’est normal qu’il y ait autant de tension entre nous, puisque rien n’intéresse les gens à part le sexe, le pouvoir et l’argent”...


Dernier fait d’armes, qui accable davantage Noël Le Graët, c’est la révélation choc de Sonia Souid, une agente de joueuse importante en France. Interrogée sur la personnalité du patron de la FFF par BFM, Sonia Souid certifie qu'il "se sait intouchable", avant de conclure : "Est-ce que je pense qu'il peut rester à la tête de la FFF? Oui, il le peut. Mais est ce qu'il doit ? Non. Je pense sincèrement qu'il a fait son temps. Je souhaite vraiment de tout mon coeur un président exemplaire pour notre fédération."

Vague de réaction contre Le Graët

Malgré toutes ces enquêtes, les accusations et l’audit qui est en cours, dont Noël Le Graët est d’ailleurs persuadé qu’il n’en sortira rien d’accablant contre lui, le Comex s’est décidé à se libérer de lui que récemment. Face au tollé médiatique après la déclaration surprenante sur Zidane, la FFF ne pouvait plus laisser passer de telles prises de paroles, qui s'apparentaient à chaque fois à des opérations suicides. Toutefois, cela faisait bien les affaires de Florence Hardouin qui tenait des relations exécrables avec Le Graët.


Kylian Mbappé, la star actuelle du football français, a déchaîné un vent de réaction en tweetant sur la polémique et en défendant “Zizou”: “Zidane c’est la France, on manque pas de respect à la légende comme ça…” Le corps politique s’est ensuite saisi de l’affaire en commençant par la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra qui s’est aussi exprimée sur Twitter en mettant ouvertement en cause le président de la 3F : “Déclarations à nouveau hors-sol avec en prime cette fois un manque de respect honteux, qui nous heurte tous, à une légende du foot et du sport : un "président" de la première fédération sportive de France ne devrait pas dire ça.” Plus tard, elle a affirmé publiquement que le président Emmanuel Macron était "vraiment déçu et heurté" par les propos de Noël Le Graët. Ce mercredi, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a affirmé que la Fédération française de football "mérite un président à la hauteur".

Au cœur de ce climat délétère, la prolongation de contrat de Didier Deschamps jusqu’en 2026 a été maintenue, alors que Noël Le Graët n’avait consulté aucun membre du Comex au moment de prendre cette décision.

Pour toutes ces raisons et bien plus encore, le ministère des Sports avait pris la décision de lancer un audit au sein de la Fédération française de football. Avant même la fin de la publication de ce dernier, Noël Le Graët est poussé vers la sortie par ses pairs, tant l’image de la 3F est entachée. Si le vice-président, Philippe Diallo, assure l’intérim, le trône est toujours en jeu et cela risque de faire couler encore beaucoup d’encre dans les prochaines semaines. À suivre…


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