A Paris, une manifestation "contre la vie chère" sur fond de pénurie de carburant
L'opposition de gauche à Emmanuel Macron espère faire monter la tension sociale en France en mobilisant dimanche ses partisans à Paris, la pénurie de carburants provoquée par une grève continuant de peser sur l'économie du pays.
A Paris, une manifestation "contre la vie chère" sur fond de pénurie de carburant (Reuters)

Cette "marche contre la vie chère et l'inaction climatique", soutenue par des associations et des fédérations syndicales, pourrait rassembler 30.000 manifestants venus de toute la France dans les rues de la capitale dimanche après-midi.

La présence d'Annie Ernaux, Prix Nobel de Littérature 2022, a été annoncée.

"On a vraiment besoin d'avoir un grand rapport de force populaire face à la politique de maltraitance sociale et écologique de ce gouvernement", a lancé dimanche matin sur Franceinfo la patronne des députés du parti d'opposition La France Insoumise, Mathilde Panot.

Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a lui fustigé "une marche des partisans du blocage du pays" une grève pour les salaires dans les raffineries et dépôts de TotalEnergies, entamée depuis bientôt trois semaines, entraînant une pénurie de carburants qui affecte de nombreux secteurs d'activité.

Près d'une station-service sur trois (27,3%) manquait d'au moins un produit samedi, selon un chiffre communiqué sur la chaine d'information BFMTV par la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher. Dans la région parisienne, la situation était plus tendue avec 39,9% de stations-service en difficulté.

Outre les automobilistes, et tout particulièrement les professionnels de santé, qui continuaient ce week-end leur quête de carburant un peu partout en France, de nombreux agriculteurs redoutent de ne pas être en mesure de réaliser leurs semis de céréales d'hiver à temps, faute de carburant, surtout dans le nord du pays.

Grève générale

Malgré un accord salarial avec deux syndicats majoritaires, la grève a été reconduite par le syndicat CGT jusqu'à mardi pour la raffinerie de Normandie située près du Havre (nord-ouest), la plus importante de France, et jusqu'à mercredi pour celle de Donges (ouest).

Gabriel Attal a jugé dimanche "inacceptable qu'il y ait la poursuite de blocages alors même que des accords majoritaires ont été trouvés pour revaloriser les salaires dans les entreprises. Je trouve ça incompréhensible. Vous avez parfois des blocages qui sont des troubles à l'ordre public".

La CGT compte tenir jusqu'à mardi, journée de "mobilisation et de grève" interprofessionnelle à laquelle ont aussi appelé d'autres syndicats (FO, Solidaires et la FSU).

Dans la perspective de cette d'action, des appels à la "grève générale" ont été lancés, notamment dans les transports (SNCF, RATP, dockers) et dans la fonction publique.

Prise en sandwich entre les deux manifestations syndicales, la "marche" de dimanche est néanmoins complémentaire des efforts de la CGT, estiment ses organisateurs. Ainsi la députée LFI Aurélie Trouvé, cheville ouvrière de l'événement de dimanche, anticipe: "D'expérience, il y a du monde à une manifestation quand il y a un climat insurrectionnel".

La police redoute d'ailleurs des débordements liés "à la venue de personnes violentes de l'ultra-gauche, des ultras gilets jaunes qui voudraient perturber la manifestation".

Le cortège comprendra cinq espaces de revendication: retraite à 60 ans et augmentation des salaires; allocation autonomie de 1.100 euros pour les jeunes; blocage des prix; taxation des super-profits; bifurcation écologique.

"La hausse des prix est insupportable: c'est la plus grande perte de pouvoir d'achat depuis quarante ans", a dénoncé samedi l'eurodéputée LFI Manon Aubry. "Il est temps que les milliards qui s'accumulent au sommet des grandes boîtes soient redistribués à ceux qui triment".

Au deuxième trimestre 2022, TotalEnergies a dégagé d'énormes bénéfices: le groupe français a plus que doublé son bénéfice net, à 5,7 milliards de dollars, contre 2,2 milliards lors du même trimestre en 2021.

Des appels émanant de l'opposition, mais aussi des rangs de partis soutenant le président Emmanuel Macron, se font de plus en plus pressants pour taxer ces super-profits, ce que le gouvernement rechigne à faire.

AFP