Le sculpteur Rodin, égyptomaniaque? Réponse inattendue dans son musée à Paris (Reuters)

Dans le cadre d'une exposition intitulée "Rêve d’Égypte", le musée Rodin présente quelque 300 pièces égyptiennes d'une collection entamée par l'illustre sculpteur dans les années 1890 et qu'il poursuivra jusqu'à la fin de sa vie, qui font écho à plusieurs de ses œuvres tardives, également exposées.

"Les plus beaux exemplaires, conservés et étudiés depuis des années dans les réserves du musée, sont montrés pour la première fois au public, en lien avec son œuvre", explique à l'AFP Bénédicte Garnier, commissaire.

"C'est un regard rétrospectif qui donne une nouvelle clef sur Rodin et éclaire ses recherches, comme l'expression d'un souvenir intériorisé d'un savoir ancien, invisible, l’Égypte", ajoute-t-elle.

Car Rodin "collectionne pour nourrir ses ambitions esthétiques alors qu'il a une quarantaine d'années, des commandes et un peu plus d'argent".

Il entame une vaste collection d'antiquités, surtout gréco-romaines. A sa mort en 1917, celle-ci compte 6.500 pièces, dont plus de 1.000 égyptiennes.

"Il achète d'abord des petits objets aux antiquaires parisiens puis à partir de 1910, il acquiert des antiquités plus importantes en taille et en qualité mais aussi en nombre, issues de chantiers de fouilles", poursuit la commissaire.

D'autres artistes de son temps seront ses "passeurs d’Égypte" à l'instar du poète allemand Rainer-Maria Rilke et sa femme sculptrice Clara Westhoff ou de la danseuse américaine Isadora Duncan, que des photos étonnantes présentées dans l'exposition montrent avec toute sa troupe devant un sphinx en Egypte.

"Il se fournit auprès d'antiquaires installés en Egypte, souvent sans voir les objets. Il a déjà en tête de créer un musée pour la postérité et l'éducation des jeunes artistes, préfiguré dès 1912 à l'hôtel Biron", l'actuel musée Rodin, ajoute-t-elle.

On découvre comment l'artiste, qui n'est jamais allé en Egypte, a été "fasciné par la simplification des lignes et des formes, l'art du contour, la monumentalité et l'aspect hiératique des sculptures de l’Égypte ancienne", selon la spécialiste.

En témoigne son Balzac, statue monumentale de l'écrivain Honoré de Balzac qui fit scandale à l'époque et est souvent présentée comme la première sculpture de l'art moderne.

Exposé en vis-à-vis d'une photo d'un colosse égyptien, près de Louxor, il a, de dos, l'exacte forme des sarcophages égyptiens. Rodin dira que c'est "le Sphinx de la France".

AFP