Emmanuel Macron et Mahamat Déby / Photo: AFP (AFP)

À deux mois de la présidentielle au Tchad, la visite de quatre jours de Jean-Marie Bockel, envoyé spécial d’Emmanuel, Macron, sonne pour certains observateurs de la scène politique locale comme un soutien appuyé de la France à Mahamat Déby, le président de la transition.

“J’ai exprimé au président de la République à la fois notre admiration pour le processus qu’il a engagé au sein de son pays, également pour la capacité du Tchad à faire face en même temps à un certain nombre de menaces grâce à des forces armées engagées”, a déclaré Jean-Marie Bockel.

Cette déclaration intervient à deux mois d’une élection présidentielle pour laquelle le candidat Déby, 39 ans, part largement gagnant en l’absence de rivaux sérieux qui représenteraient l’opposition. Certains de ses, leaders se sont ralliés à la junte tandis que d’autres ont été selon les ONG internationales de défense des droits humains, violemment réprimés. Le principal rival politique et cousin de Mahamat Déby, Yaya Dillo Djérou, est, lui, mort la semaine dernière dans un assaut de l’armée contre le siège de son parti.

Au sein de l’opinion publique tchadienne, les propos de Jean-Marie Bockel ne passent pas.

“Cela fait à peine dix jours que Yaya Dillo est mort et la France n’attend même pas. Elle est pressée de fermer les yeux sur les violations des droits de l’homme et soutenir bec et ongles les autorités en place. En retour, on maintient ses intérêts. C’est la realpolitik qui triomphe”, souligne l'essayiste tchadien Eric Topona, auteur de "Misère et grandeur de la liberté d'informer" et de Essai pour la refondation du Tchad.

Dernier ancrage de la France au Sahel

Le Tchad demeure le dernier point d’ancrage de la France, en perte de vitesse en Afrique et chassée du Mali, du Burkina Faso et du Niger.

Les forces françaises sont fortement présentes au Tchad depuis 40 ans. La principale base de l'armée française au Tchad se trouve à NDjamena. Faya et Abéché abritent les deux autres bases, avec des avions de chasse, des avions de transport et des hélicoptères. Une force de projection terrestre est aussi présente avec des blindés et des hommes.

Alors que Paris cherche à ajuster sa présence sur le continent en diminuant ses effectifs, rien n’est moins sûr au Tchad. Répondant à cet aspect précis de l’ajustement des effectifs militaires français au Tchad, l'envoyé spécial d’Emmanuel Macron en Afrique, a exprimé la volonté de la France de demeurer au Tchad.

“Ce n’est pas seulement la question du nombre, il faut rester et bien sûr nous resterons “, a martelé M. Bockel, dans son allocution.

Le Tchad occupe donc une place forte de l’influence française en Afrique et de l’avis de l’essayiste tchadien Eric Topona, Paris privilégie cette donne.

“ La France s’est toujours accommodée de la situation politique au Tchad, son dernier bastion. Elle le fait pour ses intérêts géostratégiques. Elle ferme les yeux sur les graves violations des droits humains. En retour, le pouvoir lui accorde le droit de rester. Rien ne me surprend”.

À l’observation , la France est constante dans son positionnement au Tchad, soutient l’essayiste.

” Depuis l’indépendance avec le président François Tombalbaye qui commence à s’émanciper, la France à suscité un coup d’État au profit de Felix Maloum. Après s’être lassé de Maloum, elle a jeté son dévolu sur Hissene Habré. Elle est derrière la prise de pouvoir par Idriss Déby en 1990. C’est logique qu’elle soutienne Mahamat Déby”, analyse encore cet essayiste.