Les deux finalistes vont devoir mobiliser les électeurs alors que le premier tour a été marqué par une forte abstention de 25,14% (Reuters)

Le président sortant Emmanuel Macron et la candidate d'extrême droite Marine Le Pen, qui s'affronteront le 24 avril au deuxième tour de la présidentielle française, entament lundi une campagne acharnée pour convaincre des électeurs peu emballés par ce duel et aux réactions imprévisibles.

"Rien n'est joué", "c'est une nouvelle campagne qui commence"... Les deux camps ont insisté sur l'importance des deux prochaines semaines avant le second tour, pour lequel les sondages prévoient une victoire d'Emmanuel Macron beaucoup plus étriquée qu'en 2017, quand il avait battu sèchement la dirig eante de l'extrême droite.

Arrivé dimanche soir en tête du premier tour avec 27-28% devant Mme Le Pen (23-24%), le président sortant recueillerait entre 54% et 51% des voix au second tour, contre 46-49% pour sa rivale, selon des sondages réalisés dimanche après le premier tour.

"Cette élection, il va falloir aller la chercher, parce que rien n'est joué", a reconnu lundi matin le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal sur la radio France Inter. M. Macron, entré très tardivement dans l'arène, a été critiqué pour n'avoir pas vraiment fait campagne au premier tour.

Juste a près sur la même radio, Jordan Bardella, président du Rassemblement national de Mme Le Pen, s'est dit convaincu que sa candidate bénéficierait d'un fort report des suffrages parmi "les 70% de Français qui ont voté contre" le président sortant, et a indiqué ne "pas croire" au "front républicain" contre son parti.

Trois candidats malheureux à gauche, l'écologiste Yannick Jadot (moins de 5% des voix), le communiste Fabien Roussel (2-3%), la socialiste Anne Hidalgo (moins de 2%), mais aussi la candidate de droite ont explicitement appelé leurs électeurs à voter Emmanuel Macron.

La candidate pour la droite gaulliste Valérie Pécresse a annoncé pour sa part son intention de voter "en conscience" pour Emmanuel Macron.

Les deux finalistes vont devoir mobiliser les électeurs alors que le premier tour a été marqué par une forte abstention de 25,14% et une désagrégation spectaculaire des deux partis de gouvernement de la Ve République, qui ont réalisé le pire score de leur histoire: avec moins de 5% pour Mme Pécresse, vainqueur de la primaire de la droite à l'automne, et moins de 2% pour la socialiste Anne Hidalgo.

Chasse aux électeurs de gauche

En principale ligne de mire des deux candidats, figurent les électeurs du candidat de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, arrivé troisième sur les talons de Mme Le Pen avec près de 22% des voix et qui apparaît désormais en position d'arbitre.

M. Mélenchon, leader de La France Insoumise (LFI) a répété dès dimanche soir que "pas une voix" ne devait aller à l'extrême droite, sans pour autant appeler à voter M. Macron.

Une position réitérée lundi matin par son numéro 2 Adrien Quatennens, ajoutant toutefois que "la responsabilité totale de ce qui va se passer au second t our incombe au principal protagoniste, Emmanuel Macron".

L'ambition de LFI est désormais de se battre pour les législatives de juin et d'"imposer une cohabitation" à M. Macron, a-t-il précisé.

La chasse aux électeurs de gauche est lancée. Lundi matin, M. Attal a insisté sur le bilan social de M. Macron, qui a pourtant du mal à se débarrasser de l'étiquette de "président des riches". "On a beaucoup fait pour réduire les fractures", a assuré M. Attal.

"Les candidats ne sont pas propriétaires de leurs électeurs et je pense que beaucoup de ceux qui ont voté pour Jean-Luc Mélen chon ne veulent pas de la retraite à 65 ans, ne veulent pas remettre la politique de la France entre les mains de cabinets privés et voterons pour Marine Le Pen au second tour", a rétorqué le représentant du RN Jordan Bardella.

Sur le papier, Marine Le Pen a une réserve de voix nettement moins importante que M. Macron. Elle pourra compter sur le soutien de l'autre candidat de l'extrême droite Eric Zemmour, aux alentours de 7%.

Le candidat souverainiste Nicolas Dupont-Aignan, aux alentours de 2%, a lui aussi appelé à voter Marine Le Pen.

Le débat télévisé

Un moment clé des deux semaines de la nouvelle campagne qui commence sera le 20 avril lors du traditionnel débat télévisé de l'entre-deux tours.

En 2017, il avait été désastreux pour Mme Le Pen, apparue fébrile et ne maîtrisant pas les dossiers, et avait contribué à sa défaite face à M. Macron.

Mais cette année, la fille du sulfureux tribun Jean-Marie Le Pen - le premier à conduire l'extrême droite au deuxième tour en 2002 - semble nettement mieux préparée.

Elle a conduit une campagne de terrain, axée sur le pouvoir d'achat, principale préoccupation des électeurs, tan dis qu'Emmanuel Macron, accaparé par la guerre en Ukraine, s'est peu impliqué dans ce premier tour.

Une victoire de Mme Le Pen pourrait avoir d'importantes conséquences internationales, étant donné ses positions hostiles à l'intégration européenne et sa volonté, par exemple, de sortir du commandement intégré de l'Otan.

L'élection de Mme Le Pen créerait une double première: première accession au pouvoir par les urnes de l'extrême droite et première femme présidente.

Agences