Premiers choix du prix Goncourt en France: Virginie Despentes parmi les déçus (Reuters)

L'autrice de "Vernon Subutex", de retour au roman après cinq ans, a bénéficié d'une critique quasi unanime pour cet échange épistolaire sur les addictions et le mouvement #MeToo.

Et les ventes de son nouveau roman ont atteint quelque 65.000 exemplaires, selon les chiffres avancés par son éditeur fin août.

Mais occuper beaucoup d'espace en librairie et dans la presse n'est en rien une garantie face au jury du Goncourt. Emmanuel Carrère, avec "Yoga" en 2020, s'en était rendu compte : il avait été éliminé au deuxième tour.

Lauréate du prix Renaudot en 2010, pour "Apocalypse bébé", Virginie Despentes fut elle-même jurée du Goncourt pendant quatre ans. Elle a démissionné en janvier 2020 pour se consacrer à l'écriture.

Une indication semblait percer dans la critique mitigée de "Cher connard" par l'un des 12 membres de l'Académie Goncourt, Pierre Assouline, sur son site internet.

Ce journaliste et auteur a fait savoir, en revanche, qu'il avait adoré deux titres de la première sélection, qui apparaissent à ce stade parmi les favoris : "La Vie clandestine" de Monica Sabolo, qui mêle histoire personnelle et enquête sur le groupe d'extrême gauche Action directe, et "Le cœur ne cède pas" de Grégoire Bouillier, retour en 900 pages sur un fait divers terrible des années 1990, l'agonie volontaire d'une vieille dame solitaire.

Heureuse surprise

D'autres titres sont perçus comme des prétendants sérieux par leur qualité d'écriture : "Taormine" d'Yves Ravey, roman noir qui se déroule en Sicile, "Vivre vite" de Brigitte Giraud, récit des derniers temps d'un mari qui s'est tué en moto, ou "Les presque sœurs" de Cloé Korman, une enquête sur la Shoah.

Muriel Barbery, qui paraissait très loin des goûts du Goncourt avec son premier succès en 2007 ("L'Élégance du hérisson"), est 15 ans plus tard dans la course avec "Une heure de ferveur".

La première liste du Goncourt est toujours une heureuse surprise pour quelques romans discrets jusque-là. C'est le cas cette année pour "Beyrouth-sur-Seine" du Franco-Libanais Sabyl Ghoussoub, "Une somme humaine" du Haïtien Makenzy Orcel, ou "Notre si chère vieille dame auteur" d'Anne Serre.

Une fiction sur un conseiller de la présidence russe a été incluse malgré une parution en avril : "Le Mage du Kremlin" de Giuliano da Empoli, recommandé parmi les lectures d'été du prix Renaudot.

Le lauréat ou la lauréate doit être désigné(e) le 3 novembre.

Penchant pour les "grandes"

La sélection a prouvé le penchant du Goncourt pour les "grandes" maisons d'édition, avec trois auteurs de Gallimard, deux de Flammarion ou de Stock, un du Seuil, d'Albin Michel, d'Actes Sud ou encore de Minuit.

Des maisons "moyennes" s'y font une place plus réduite : Rivages, L'Iconoclaste et Sabine Wespieser.

L'éditeur de "Cher Connard", Grasset, ne place aucun titre dans cette première sélection, mais pourra se rattraper avec d'autres prix d'automne. Le Renaudot suit mercredi, en divulguant sa première sélection.

Le prix littéraire des Inrocks a publié mardi une première sélection de vingt "romans ou récits français" où figure celui de Virginie Despentes. On y retrouve d'autres titres non retenus par le Goncourt, quoique remarqués par la critique, comme "La Treizième Heure" d'Emmanuelle Bayamack-Tam, "Vers la violence" de Blandine Rinkel, ou "Les Exportés" de Sonia Devillers.

Le Goncourt des lycéens, décerné en décembre, planchera sur les mêmes titres que son aîné, de Lens (nord de la France) à New York, en passant par l'île de Martinique, dans les Caraïbes.

AFP