Macron prépare les Français à des temps encore plus difficiles (AA)

Après un premier mandat (2017-2022) au bilan environnemental jugé insuffisant par nombre d'écologistes, d'ONG et d'experts, M. Macron a estimé mercredi que "ce que nous sommes en train de vivre est plutôt de l'ordre d'une grande bascule ou d'un grand bouleversement", lors d'une allocution devant ses ministres retransmise à la télévision.

Citant les effets de la guerre en Ukraine, débutée il y a six mois jour pour jour, et de la crise climatique, il a mis en avant "la fin de l'abondance", que ce soit "des liquidités", "des produits de technologie", des matières premières ou de l'eau.

Chaînes de production perturbées par la pandémie, inflation dopée par la hausse des prix de l'énergie et de l'alimentation du fait de la guerre en Ukraine, hausse des taux d'intérêt qui renchérit le coût du crédit... Les ménages français sont sous pression, et l'horizon ne promet pas d'embellie.

Pire, la perspective d'une explosion des prix de l'énergie pendant l'hiver risque de limiter leur capacité à se chauffer, et les marges budgétaires du gouvernement pour les y aider sont réduites par les dépenses engagées pour amortir l'impact du Covid-19.

Les Français sortent aussi d'une période estivale marquée par une canicule et une sécheresse historiques, révélatrices de l'effet du réchauffement climatique.

L'heure est désormais à "la mobilisation générale", selon l'entourage du président, qui avait assuré pendant la campagne que "la politique qu'(il) mènerait dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas". Avec un mot d'ordre, "la sobriété énergétique", qui devra faire l'objet d'un projet de loi d'accélération des énergies renouvelables.

Réaction du peuple ?

Face à ce changement de paradigme environnemental, et alors que la France se souvient du mouvement social des Gilets Jaunes, creuset des colères d'une partie de la population, Emmanuel Macron, soulignant que ses "compatriotes peuvent réagir avec beaucoup d'anxiété", a appelé son gouvernement au "respect de la parole donnée et des engagements" pris.

"Le mécontentement est là", prévenait lundi sur la radio France Inter l'économiste Philippe Moati, relevant que selon un sondage de son institut Obsoco en juin, la part des Français qui soutiennent les Gilets jaunes est remontée à 60%, soit autant qu'au plus fort de la mobilisation, en février 2019.

"On ne peut plus du tout être sur un discours optimiste. L’état d’esprit français est très différent", abondait auprès de l'AFP Jean-Daniel Lévy, directeur délégué de l'institut Harris Interactive France.

Dans ce contexte, opposition de gauche et syndicats ont critiqué les déclarations du président, largement réélu face à l'extrême-droite en avril, mais privé d'une majorité absolue à l'Assemblée nationale en juin.

"C'est un message décalé. Quand on parle de fin de l'abondance, je pense aux millions de chômeurs, aux millions de précaires", a réagi le patron du syndicat CGT (Confédération générale du travail), Philippe Martinez, sur la chaîne d'informations BFMTV.

Plusieurs organisations ont lancé un appel à la grève et à la mobilisation pour le 29 septembre.

"Non mais on rêve ! Comme si les Français avaient manqué de soucis et s'étaient trop gavés", s'est indigné le secrétaire général du Parti communiste français, Fabien Roussel, sur Twitter.

"Quand vous êtes dans un pays où il y a neuf millions de pauvres (...), entendre un truc pareil, c'est incroyable", a renchéri le leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon.

Alors que certains grands pays européens, Italie et Espagne, vont avoir des élections générales prochainement, Emmanuel Macron a aussi mis en garde contre "la fin des évidences", comme la "démocratie, les droits de l'homme".

Le régime démocratique libéral occidental semble s'éroder face aux modèles illibéraux et à certains mouvements politiques dans leurs propres populations.

Enfin, le président français a évoqué la menace cyber dans un contexte où les attaques se multiplient et pourraient encore augmenter cet automne, selon certains observateurs.

AFP