Pipelines dans l'État de Rivers, au Nigeria, le 18 septembre 2020. / Photo: Reuters (Reuters)

Cette fin d’année devrait marquer l'entrée du Niger, un pays enclavé d'Afrique de l'Ouest dans le cercle fermé des exportateurs de pétrole. Et ce, grâce au lancement du pipeline transportant le brut nigérien, depuis les puits pétroliers d'Agadem (sud-est du Niger) jusqu'à Sèmè (sur la côte atlantique béninoise).

Le méga-projet d'environ 1980 kilomètres (dont 675 kilomètres sur le territoire béninois) a été confié à l'entreprise chinoise China National Oil and Gas Exploration and Development Company Ltd (CNODC). Cette entreprise à son tour, a créé deux filiales pour la construction et la gestion de l'oléoduc.

Il revient ainsi à la West African Oil Pipeline Company (WAPCo, au Niger et au Bénin) de construire, exploiter, entretenir et gérer ce pipeline très attendu au Niger.

Seulement, dans un contexte d’embargo généralisé sur le Niger, l’on peut légitimement se demander si le maître d’ouvrage, la China National Oil and Gas Exploration and Development Company Ltd (CNODC) réussira à rendre le chantier dans les délais, au dernier trimestre de cette année.

Les autorités béninoises se veulent pourtant rassurantes.

"La situation politique actuelle n'a rien à voir avec l'exécution du projet", a déclaré à Reuters Alassane Kora, directeur de cabinet adjoint du ministre béninois des mines et de l'énergie.

"Cela veut dire qu'en ce moment, les travaux avancent au Niger et au Bénin. Il n'y a peut-être qu'un retard dans le calendrier. Sinon, en temps normal, d'ici octobre ou début novembre, les premières gouttes, les premiers essais, auraient dû être faits”, a ajouté Alassane Kora.

Le Niger subit actuellement les sanctions économiques censées obliger les militaires au pouvoir à restaurer l’ordre constitutionnel. Outre la fermeture des frontières, ces sanctions comprennent le gel des avoirs du pays à la Banque des États d'Afrique de l'Ouest et la suspension des transactions commerciales.

Dans ce contexte, il est difficile de faire parvenir le reste des équipements de l’étranger et même des techniciens spécialisés pour tester l’oléoduc.

Interrogé par RFI, Amaury de Félingonde, directeur associé d’Okan, un cabinet de conseil en stratégie et en finance dédié à l’Afrique impliqué dans ce projet, redoute un retard à l’allumage.

“Mais il est sûr qu'aujourd'hui, avec le blocus, la finalisation du projet va être probablement compliquée. Pour faire des essais, il faut faire venir des techniciens, ce qui va être probablement compliqué dans les mois à venir”, a-t-il expliqué.

Une croissance à deux chiffres

Avant le coup d’Etat militaire du 26 juillet, les autorités nigériennes plaçaient le pétrole au centre de leur stratégie de développement. L'or noir sera le moteur qui impulsera “tout développement économique et social pour les populations actuelles et les générations à venir”, affirmait le 11 janvier 2019 le Premier ministre d'alors, Brigi Rafini.

Si le calendrier prévisionnel des travaux est effectivement respecté, la croissance devrait bondir de 6 à 12 % dans deux ans, les recettes pétrolières devraient représenter 25% du PIB du pays en 2025 (contre 4 % en 2017) et 45 % des recettes du Niger contre 19% en 2017, d'après les projections du cabinet Okan, spécialisé en stratégie et finance, rapporte Jeune Afrique.

Cet oléoduc devrait aussi booster le secteur de l'emploi avec 8 à 12 % d'emplois salariés (contre 5 à 8 % en 2012). "Ce projet d’un coût de 4,5 milliards de dollars (2500 milliards FCFA environ), en investissement direct, créera environ 3000 emplois pendant la phase des travaux et 500 emplois permanents (300 au Niger et 2OO au Bénin) durant la période d’exploitation du pipeline ".

De quoi transformer radicalement l'environnement socio-économique du Niger, l’un des pays les plus pauvres du monde. Il est classé 189e sur 191 à l’indice de développement humain.

Seulement, cette belle dynamique risque d’être compromise par les sanctions économiques qui s’abattent sur Niamey.

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