Les débats sur les réformes écologiques s’enveniment en France (Reuters)

La "sobriété", mot d’ordre du gouvernement, est plus que jamais d’actualité, notamment dans le cadre "énergétique" depuis l’offensive russe en Ukraine qui a fait flamber les prix de gaz et dans le cadre "climatique" après un été marqué par les vagues de canicule, la sécheresse historique ou encore les feux de forêts à répétition.

Après le premier Conseil des ministres de la rentrée, Emmanuel Macron avait averti les Français de la "fin de l’abondance" et de la "fin de l’insouciance" que fait face la France en les prévenant de l'arrivée des "efforts" et des "sacrifices". Le président a également demandé à la Première ministre Elisabeth Borne, directement chargée de la planification écologique et énergétique, de "remettre à l'automne un agenda de planification écologique décliné par mois et années".

Borne a appelé pendant la Rencontre des entrepreneurs de France du Medef, qui s’est ouverte aujourd’hui, à la "responsabilité collective" en matière d'économies d'énergie parce qu'il "faut agir plus vite et plus fort" face au dérèglement climatique et à la flambée des prix de l'énergie.

"C’est parfois le choix de la radicalité qui s’impose. Ce sera le cas sur les enjeux écologiques et climatiques. C’est désormais "la seule option", avait prévenu la Première ministre, lors d’un discours prononcé devant les responsables du futur parti présidentiel, Renaissance.

La Première ministre a présenté samedi les premières mesures, dont le déblocage d'un "fonds vert" doté d'1,5 milliard d'euros et destiné aux collectivités locales pour "les aider dans l'accélération de leur transition écologique". "Le gouvernement a parfaitement compris que la lutte contre le réchauffement climatique, la vraie, se jouait au niveau des territoires", se félicite Renaud Muselier, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Les députés divisés

Les députés mettent en avant chacun des problèmes à traiter à différents niveaux d’importance, qui ne font pas l’unanimité au sein du gouvernement.

"Est-ce que notre ambition pour l’écologie doit se réduire à arrêter d’arroser les golfs ou à interdire les piscines privées?", a ironisé la Première ministre.

"Interdire les piscines privées? La question est légitime et il ne faut pas en avoir peur", a commenté Pascal Canfin, le président (LREM) de la commission de l’environnement du Parlement européen.

"Je préconise de lancer une réflexion sur la sobriété dans notre consommation de loisirs, du jet-ski à la neige artificielle", avance la députée Renaissance Cécile Rilhac.

Si Julien Bayou, député écologiste, et David Belliard, maire adjoint de Paris, ont appelé à interdire les jets privés qui polluent énormément, pour Manuel Bompard, député la France insoumise des Bouches-du-Rhône, l’interdiction n’est pas une solution. "L'interdiction n'est pas toujours la solution à tout (…) On ne peut pas continuer comme si de rien n'était et considérer que les pauvres doivent faire des efforts face à l'urgence climatique et que les ultras riches peuvent continuer à se gaver et à profiter", a-t-il dénoncé.

Borne a quant à elle rétorqué en défendant que le sujet de la crise climatique ne peut pas être réglé en se focalisant uniquement sur la question des jets privés.

"Séparatisme climatique"

Certains députés soulignent la nécessité que les efforts doivent être entrepris par tous, et non pas par une seule partie de la population. Alors que le délégué général de La République en marche, Stanislas Guerini ne veut pas, "sous couvert de planification écologique, refaire la lutte des classes", Yannick Jadot dénonce "les plus riches qui font sécession de leurs responsabilités sociales et climatiques".

"Il ne peut pas y avoir de séparatisme climatique. C’est la condition nécessaire pour garantir l’acceptabilité des mesures à prendre pour le climat. On a là un vrai sujet politique dont la majorité doit se saisir, pour trouver un chemin qui garantit les acquis de l’attractivité économique et une transition écologique juste", insiste Pascal Canfin.

Les entreprises sont prêtes à un effort "significatif"

Devant le Medef, Borne a invité chaque entreprise à établir en septembre "un plan de sobriété" afin que leur consommation baisse de 10 %. "L'heure n'est plus aux demi-mesures, l'heure n'est plus au chacun pour soi, l'heure est à la responsabilité collective", a affirmé la Première ministre.

Les entreprises sont prêtes à un effort "significatif" mais "indispensable" pour réduire leur consommation d'énergie d'environ 10%, a déclaré le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux.

Interrogé lundi matin sur France inter sur cet objectif, Geoffroy Roux de Bézieux a répondu que "ce n'est pas impossible (...), c'est un effort significatif mais absolument indispensable parce que ce qu'on veut éviter absolument, c'est le rationnement ou le délestage".

"Tout le monde va s'y mettre, on va appeler à la mobilisation", a-t-il dit en ajoutant que les entreprises allaient "essayer (...), faire des efforts" parce que "tout le monde est dans le même bateau".

"C'est l'intérêt des entreprises de baisser leur consommation d'énergie pour des raisons pécuniaires, après il faut pouvoir le faire et tout le monde n'est pas égal", a-t-il précisé.

Au cours d'un entretien télévisé pour le 14 Juillet, le président de la République avait invité les administrations publiques et les entreprises à préparer des plans pour consommer moins d'énergie, appelant également la population générale à la sobriété énergétique en fixant un objectif d'une réduction de 10% de la consommation énergétique en France d'ici 2024.

Les premiers décrets pris cet été à cet effet par le gouvernement, l'un sur l'extinction des publicités lumineuses la nuit et le second sur la fermeture des portes pour les commerces climatisés, vont être promulgués "dans quelques jours, quelques semaines", a précisé Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du commerce, de l'artisanat et du tourisme.

Le gouvernement fera un point fin septembre avec les différentes filières d'activité sur "la feuille de route sur le plan de sobriété", a-t-elle annoncé.

"Tous les établissements recevant du public doivent faire un effort pour passer ensemble l'hiver et réduire très rapidement leur consommation", a-t-elle souligné, le gouvernement n'excluant pas d'en passer par la contrainte.

D’autres mesures doivent être annoncées dans les prochains jours, après un séminaire gouvernemental prévu mercredi.

TRT Français et agences