Maire en exercice de la mégapole de 16 millions d'habitants, Imamoglu a été confronté à toute une série de défis. / Photo: AA (AA)

Alors que la Turquie se prépare aux élections locales du 31 mars, Ekrem Imamoglu vise un second mandat en tant que maire d'Istanbul

Maire en exercice de la mégapole de 16 millions d'habitants, Imamoglu, qui représente le principal parti d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP), a été confronté à toute une série de défis. Et pour cause, son mandat a déjà été entaché de critiques liées à plusieurs promesses électorales non tenues et à des controverses au cours des cinq années de l’exercice de ses fonctions en cours.

Alors qu'il a commencé son mandat en fanfare, il s'est rapidement retrouvé sous le feu des projecteurs en raison de l'adoption d'une série de mesures controversées en matière de transformation urbaine, de développement du logement et de gestion de la circulation.

L'attention portée par M. Imamoglu à la politique nationale, notamment sa participation active aux rassemblements de l'élection présidentielle l'année dernière, a également suscité des critiques. Et ce, car les électeurs stambouliotes ont estimé que le maire consacrait toute son attention à présenter le candidat présidentiel du CHP, Kemal Kilicdaroglu, sous son meilleur jour, tout en se détournant des problèmes urgents de la ville, tels que la désorganisation des transports en commun.

Au milieu des débats sur ses priorités et son efficacité, la candidature d'Imamoglu à la réélection soulève des questions sur l'avenir d'Istanbul.

Voici un portrait plus détaillé d'Imamoglu et un aperçu plus approfondi de son mandat :

Qui est Imamoglu ?

Né en 1970 à Trabzon, Imamoglu est diplômé du lycée de Trabzon et titulaire d'un diplôme en administration des affaires de l'université d'Istanbul. Détenteur également d'une maîtrise en ressources humaines et en gestion, il commence sa carrière en 1992 dans une entreprise familiale de construction, où il a occupé le poste de président du conseil d'administration.

Il a été chef du district de Beylikduzu pour le CHP en 2009 et a été élu maire de Beylikduzu le 30 mars 2014.

Il est marié à Dilek Imamoglu et est père d’une fille et de deux garçons.

Peu de promesses électorales tenues

Dans la perspective des élections municipales de 2019, Imamoglu avait fait campagne en promettant de réduire la pauvreté urbaine et de moderniser les infrastructures de la ville, notamment les lignes de métro et les espaces verts.

En ce qui concerne la transformation urbaine, Imamoglu a fait une série de grandes promesses visant à améliorer les conditions de vie des habitants d'Istanbul.

Mais plusieurs de ces engagements n'ont pas encore été tenus, tandis que d'autres n'ont été que partiellement réalisés au cours des cinq dernières années.

Selon un site web turc qui évalue le taux de réalisation des promesses faites lors des élections municipales de 2019, Imamoglu n'a réalisé que 7% de ses engagements.

L'une des promesses d'Imamoglu était d'assurer des garanties de résidence pour les Stambouliotes et de résoudre les problèmes de titres de propriété. Toutefois, les progrès réalisés sur ces fronts depuis le début de son mandat restent incomplets.

Il s'est également engagé à construire des logements sociaux non seulement dans la périphérie de la ville, mais aussi dans les quartiers centraux. Par l'intermédiaire de KIPTAS, la société municipale qui réalise les projets de logement, il avait promis de produire 100 000 nouveaux logements au cours de son mandat de cinq ans, dont 40% devaient être destinés à la location. Cependant, seules 9 652 de ces unités de logement ont été achevées, selon les données officielles.

Dans le cadre du projet "Single Building Transformation", les immeubles d'habitation de la ville qui nécessitaient une rénovation devaient être reconstruits. Toutefois, au cours des cinq dernières années, seul un immeuble situé à Kadikoy, dans le centre-ville, a subi la transformation promise.

Imamoglu avait également promis de s'attaquer aux embouteillages, l'un des principaux défis de la ville la plus peuplée d'Europe, Istanbul. Un autre objectif initial était d'étendre le réseau de métro d'Istanbul, en visant un total de 630 km de lignes de métro, y compris des plans pour 11 nouvelles lignes de funiculaires.

Au bout de cinq ans, ses réalisations en matière de construction de métro restent discutables, les annonces officielles indiquant que seuls 47 km de lignes de métro ont été achevés, dont la plupart avaient été lancés par ses prédécesseurs affiliés à l'AK Party.

Certains analystes contestent même ces chiffres, affirmant que seuls sept kilomètres ont été achevés. À l'heure actuelle, Istanbul dispose d'un réseau de métro de 328 km, dont 215 km sont exploités par la filiale Metro Istanbul de la municipalité. Ce qui est nettement inférieur aux 630 km promis par M. Imamoglu en 2019. En conséquence, il n'a inauguré qu'une seule des 11 lignes de funiculaires qu'il avait faites miroiter pendant sa campagne électorale.

M. Imamoglu avait également promis la gratuité du stationnement pour les résidents dans leur quartier, dans le cadre de son engagement à alléger le fardeau des citoyens. Il avait de surcroît assuré que les résidents ne seraient plus obligés de payer pour le stationnement dans les installations de l'ISPARK dans leurs quartiers, et qu'il rendrait les parkings des institutions publiques accessibles au public en dehors des heures normales de travail.

Cependant, les Stambouliotes continuent de payer pour ISPARK, dont les prix ont été multipliés par dix au cours des cinq dernières années, tandis que la promesse de nouveaux parkings pour 100 000 véhicules n'a pas été tenue, puisque seuls 30 000 nouveaux parkings ont été ajoutés au cours de son mandat.

De la transformation verte au renforcement des infrastructures, de nombreuses autres promesses électorales qui ont propulsé Imamoglu au siège de maire en 2019 doivent encore être réalisées.

Il a toutefois tenu, en tout ou en partie, certaines promesses, telles que la gratuité des transports pour les mères pendant les quatre premières années suivant l'accouchement, l'ouverture de restaurants urbains à des prix plus abordables et la construction de salles de sport, de piscines et de parcs. Les données officielles publiées par la municipalité métropolitaine d'Istanbul indiquent également que plus de 170 000 demandeurs d'emploi ont obtenu un placement par l'intermédiaire des centres de médiation de la municipalité.

Un dîner inopportun avec l'ex-ambassadeur britannique sous les neiges paralysantes d’Istanbul

Il y a deux ans, M. Imamoglu avait dû faire face à une avalanche de critiques lorsque des images de lui dînant avec l'ancien ambassadeur britannique Dominic Chilcott dans un restaurant avaient fait surface, alors que la ville était aux prises avec d'importantes chutes de neige, provoquant des perturbations généralisées.

Alors que les photos circulaient sur les médias sociaux, le hashtag "#imamoğluistifa" ("Imamoglu, démissionne" en turc) a gagné en popularité, les utilisateurs exprimant leur frustration face à l'apparent détachement du maire vis-à-vis des problèmes rencontrés par les citoyens. Imamoglu s'est défendu par une déclaration sur les médias sociaux, affirmant qu'il avait été au restaurant "pendant une pause", laissant entendre qu'il avait par ailleurs travaillé pour apporter de l'aide aux citoyens.

Campagne pour l'élection présidentielle de 2023

L'année dernière, M. Imamoglu a également organisé plusieurs rassemblements pour soutenir le candidat à l'élection présidentielle de l'Alliance nationale, Kemal Kilicdaroglu, qui a perdu la course face au président Recep Tayyip Erdogan. Ces rassemblements organisés dans différentes villes d'Anatolie l'ont contraint à quitter Istanbul pendant plusieurs semaines, ce qui a suscité l'indignation des Stambouliotes pour ce changement d'orientation vers la politique nationale.

TRT Francais