Une manifestante porte une pancarte dans une manifestation lors de la COP15 à Montréal, Quebec (Canada) / Photo : Reuters (Others)

Les pays du monde entier, réunis depuis 10 jours à Montréal (Canada) pour la COP15, se rapprochaient dimanche d'un accord pour mieux protéger la biodiversité de la planète, après des avancées concernant les zones protégées et le déblocage de nouveaux moyens financiers.

Mais plusieurs points restaient encore en discussions, certains pays du Sud demandant toujours davantage de financement et les pays riches négociant de relever certaines ambitions. Ce "pacte de paix avec la nature", dont la planète a cruellement besoin pour enrayer la destruction de la biodiversité et de ses ressources indispensables à l'humanité, doit être conclu avant mardi.

Les pays travaillent depuis dimanche matin sur un projet d'accord présenté par la présidence chinoise de la COP15. Figure dans ce texte, qui pourrait devenir l'"accord de Kunming-Montréal", l'objectif de protéger 30% des terres et des mers de la planète d'ici 2030.

Cette cible, la plus connue de la vingtaine de mesures, a été présentée comme l'équivalent pour la biodiversité de l'objectif de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. A ce jour, 17% des terres et 8% des mers sont protégées.

Mais le texte donne également des garanties pour les peuples autochtones, gardiens de 80% de la biodiversité subsistante sur Terre. Et pour tenter de résoudre la question financière toujours brûlante entre le Nord et le Sud, la Chine propose par ailleurs d'atteindre "au moins 20 milliards de dollars" d'aide internationale annuelle pour la biodiversité d'ici 2025 et "au moins 30 milliards d'ici 2030".

"Je pense que nous sommes très prêts d'une entente", a déclaré Steven Guilbeault, le ministre de l'Environnement du Canada, pays hôte du sommet, estimant qu'il ne reste que des "ajustements" à faire dans les heures à venir. Mais le commissaire européen à l'Environnement, Virginijus Sinkevicius, a émis une note plus prudente, signalant que les chiffres de financement discutés pourraient être difficiles à atteindre.

"Si d'autres pays s'engagent à atteindre ces objectifs, comme la Chine, je pense que cela peut être réaliste", a-t-il déclaré, appelant également les États arabes à jouer leur rôle. Les délégués doivent se retrouver pour une nouvelle session plénière dimanche soir.

La question du financement

La question du financement qui crispe les discussions depuis 10 jours reste cruciale. En échange de leurs efforts, les pays les moins développés réclament aux pays riches 100 milliards de dollars par an. Soit au moins 10 fois l'aide internationale actuelle pour la biodiversité. Braulio Dias, qui représente le futur gouvernement brésilien de Luiz Inacio Lula da Silva, a redemandé dimanche une "meilleure mobilisation des ressources" - c'est-à-dire une aide accrue aux pays en développement, une préoccupation reprise par le Congo notamment.

Outre les subventions, les pays du Sud poussent aussi fortement à la création d'un fonds mondial dédié à la biodiversité - une question de principe - à l'image de celui obtenu en novembre pour les aider à affronter les dégâts climatiques.

Sur ce point, la Chine propose comme compromis d'établir dès 2023 une branche dédiée à la biodiversité au sein de l'actuel Fonds mondial pour l'environnement (FEM), dont le fonctionnement actuel est jugé très déficient par les pays les moins développés.

"Arme d'extinction massive"

De leurs côtés, les ONG se montraient partagées. Pour Brian O'Donnell, de l'ONG Campaign for nature, ce texte "donne une chance à la nature. S'il est approuvé, les perspectives pour les léopards, les papillons, les tortues de mer, les forêts et les populations s'amélioreront nettement".

Mais An Lambrechts de Greenpeace International s'inquiétait d'un "projet d'accord faible" qui ne "permettra pas d'arrêter la perte de biodiversité, et encore moins de l'inverser". Cela pourrait même être une "invitation ouverte au greenwashing", selon elle.

D'autres craignaient des échéances trop lointaines au vu de l'urgence actuelle. Car les scientifiques sont formels, le temps presse. 75% des écosystèmes mondiaux sont altérés par l'activité humaine, plus d'un million d'espèces sont menacées de disparition et la prospérité du monde est en jeu: plus de la moitié du PIB mondial dépend de la nature et de ses services.

Par ailleurs le plan décennal précédent signé au Japon en 2010 n'a atteint quasiment aucun de ses objectifs, notamment en raison de l'absence de mécanismes d'application véritables.

Estimant que l'humanité était devenue une "arme d'extinction massive", le chef de l'ONU Antonio Guterres avait appelé les parties à conclure un "pacte de paix avec la nature".



AFP