France: les sans-abri, des "piliers" de l'aéroport parisien de Roissy (Others)

Entre 80 et 100 sans domicile fixe (SDF), en majorité des personnes pauvres et quelques demandeurs d'asile, sont recensés à Roissy, l'un des plus grands aéroports d'Europe. "L'aéroport est un lieu public, comme pour une gare, on ne peut pas empêcher des sans-abris de rentrer", déclare les Aéroports de Paris (ADP), gestionnaire de la plateforme.

Le groupe a noué un partenariat avec la Croix-Rouge, association d'aide humanitaire, pour assurer leur prise en charge. Une maraude quotidienne est assurée et une solution d'hébergement peut être proposée mais la plupart "n'en veulent pas", assure ADP.

Sollicité par l'AFP, la Croix-Rouge n'a pas souhaité détailler ses missions. Parmi eux, Garry Régis-Luce, 32 ans, avait "ses habitudes" depuis quelques mois au terminal 2F de l'aéroport parisien.

Le matin de son décès, ce sans domicile fixe martiniquais "importunait des agents de sécurité et la police aux frontières (PAF) a été appelée en renfort pour le faire évacuer", selon la version policière.

D'après leur récit, l'homme s'éloigne, tout en les invectivant, puis se retourne et sort un couteau. Un des quatre policiers, appelés en renfort, fait alors usage de son arme.

Une enquête a été ouverte pour "homicide volontaire par personne dépositaire de l'autorité publique" et confiée à la police des polices. "La question va se poser, s'il n'y avait pas moyen de le neutraliser autrement", indique une source proche du dossier, précisant que les policiers "le connaissaient".

"Je suis bien là!"

"Je le connaissais. Il était particulièrement agressif mais envers lui-même, il n'a jamais agressé physiquement une personne", assure de son côté Hassem, employé d'ADP, qui a souhaité conserver l'anonymat.

A Roissy, "les SDF ont toujours été là, ce sont des piliers, ils ont des histoires. J'en ai vu mourir, c'est leur maison, l'aéroport", confie Hassem, qui travaille sur site depuis 20 ans.

Deux-tiers des sans domicile fixe "sont très anciens". "Ils sont discrets, bénéficient de la clim l'été, du chauffage l'hiver, ils jouent le jeu et n'importunent pas les passagers", détaille une source aéroportuaire.

"On en a quelques-uns qui ont des problèmes psychiatriques, qu'on va signaler auprès des autorités judiciaires pour envisager un placement", poursuit cette source.

La police aux frontières a pour consigne "de prendre les identités des nouveaux sans-abris" et de "s'assurer qu'il n'y ait pas de trouble à l'ordre public et on les laisse tranquilles", assure-t-on.

"Les SDF ont besoin d'une seule chose, c'est une place pour dormir", estime Mamane, agent de sécurité depuis deux mois. "On les réveille vers 7-8 heures du matin (05H-06H GMT). On n'a pas le droit de les sortir", souligne l'agent.

Pendant sa ronde, il désigne discrètement quelques sans-abris "visibles", allongés sur les bancs. D'autres, valises posées sur un chariot, se fondent dans le brouhaha des estivants.

"A 99%, ils sont très calmes, certains nous insultent mais ils n'ont jamais touché un passager", assure Mamane. Parmi les sans-abri, Vanessa, une figure de l'aéroport. "Installée" à Roissy depuis trois ans, cette Franco-Camerounaise de 43 ans vit de la "débrouille".

"Des fois, j'aide à porter ou emballer les valises et on me donne des pièces", confie cette coquette femme. Écouteurs vissés aux oreilles, elle "regarde Sherlock Holmes" sur son téléphone, assise à côté d'un passager anglais prêt à embarquer pour Bamako.

"Je suis bien là!", assure Vanessa qui n'envisage pas de s'installer ailleurs.

AFP