Le duel Macron/Le Pen se durcit avant le débat (AP)

Après un début de campagne d'entre deux tours marqué par une quête de proximité pour le président-candidat et une recherche de crédibilité pour Marine Le Pen, le ton se fait de plus en plus acerbe entre les deux adversaires, qui s'affronteront mercredi dans un débat télévisé, point d'orgue de la campagne.

En meeting jeudi soir à Avignon, dans le sud de la France, Mme Le Pen a appelé à faire "barrage" au président sortant, inversant les rôles puisque "faire barrage" en France est une formulation visant l'extrême droite depuis que celle-ci accède au second tour des élections présidentielles.

"Vous ne croyez pas qu'il y a des millions, des dizaines de millions de Français qui considèrent que le gouvernement d'Emmanuel Macron a été un gouvernement affreusement autoritaire, qu'il a gouverné seul, avec brutalité, qu'il a réprimé des manifestations (...), qu'il a dirigé avec brutalité en méprisant l' Assemblée nationale?", a-t-elle renchéri vendredi sur BFMTV/RMC.

Sur la radio France Info, le président sortant, qui a déjà accusé sa rivale de "dérive autoritaire", a rétorqué que le programme de l'extrême droite n'était pas "la douceur incarnée".

Appels du pied

A neuf jours du second tour, M. Macron garde l'avantage dans les intentions de vote (de 53 à 55%) mais avec une marge beaucoup plus réduite qu'en 2017 (66/34%).

Et avec plusieurs inconnues de taille, notamment le niveau de l'abstention et le report des 21,95% de voix qui se sont port ées dimanche sur le candidat de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon.

Les deux finalistes continuent d'ailleurs à lancer des signaux vers l'électorat de gauche, arbitre de l'élection.

Interrogé sur l'éventualité qu'il nomme un Premier ministre issu de la gauche, Emmanuel Macron a répondu "qu'il n'excluait jamais rien".

Le président, qui s'est toujours présenté comme "ni de droite ni de gauche" mais a été souvent taxé de "président des riches", a également jugé "choquant et excessif" le montant des rémunérations des dirigeants du groupe automobile Stellantis, et s'est pron oncé pour des "plafonds", au niveau de l'Union européenne.

"La politique aujourd'hui, ce n'est pas le gouvernement du peuple (...) pour le peuple. C'est le gouvernement par un petit nombre pour un petit nombre", a asséné de son côté Mme Le Pen, qui se targue de représenter "la France des oubliés" et a fait campagne au premier tour sur le thème du pouvoir d'achat.

Débat autour du voile

Pour M. Macron, la campagne d'entre-deux-tours ne ressemble en rien à celle du premier, qui s'était déroulée dans l'ombre de la guerre en Ukraine. Il n'avait fait qu'u n seul meeting et peu de déplacements.

Depuis lundi, il multiplie les immersions en région avec des rencontres et échanges parfois vifs à l'occasion de longs bains de foule. Il tiendra un grand meeting samedi à Marseille (sud-est), deuxième ville de France.

Changement de ton et de rythme aussi pour Marine Le Pen qui menait une campagne à bas bruit, favorisant les déplacements dans de petites localités. Désormais, elle va de média et média et aborde les sujets régaliens, comme la réforme des institutions et la diplomatie.

"On est à fronts renversés: Emmanuel Macron va chercher dans cette campagne à rétablir une image de proximité qu'il n'a pas et Marine Le Pen va chercher à installer une image de crédibilité qu'elle a moins que Macron", analyse auprès de l'AFP Bernard Sananès, président de l'institut de sondages Elabe.

En visite surprise sur un marché de Pertuis (sud-est) vendredi, Mme Le Pen, dont le programe prévoit l'interdiction du voile dans l'espace public sous peine d'amende, a été interpellée par une femme voilée.

"Vous savez très bien qu'il y a un certain nombre de quartiers dans lequels des femmes qui ne portent pas le voile sont mises à l'écart, jugées.

Et moi je ne veux pas qu'ici en France une seule femme soit mise à l'écart parce qu'elle refuse" de porter le voile, a lancé la candidate lors d'un échange animé mais courtois.

M. Macron se pose de son côté en défenseur de la laïcité et des libertés religieuses. Si "Marine Le Pen interdit le voile, de par notre Constitution, elle va devoir interdire la kippa, (...) la croix, (...) les autres signes religieux", a-t-il récemment déclaré.

Agences