Noor Slaoui, la cavalière marocaine. / Others (Others)

Entre deux entraînements, Noor Slaoui prend le temps de répondre à nos questions. Ses réponses puisent leur essence dans l’enfance de cette native de Casablanca. De prime abord et tout naturellement, elle évoque, dans son élément et environnement préféré, sa passion et son amour pour le cheval avec beaucoup de ferveur.

4 ans, les débuts à dos de mulet

« À l’âge de 4 ans, je me rappelle que j’allais beaucoup en randonnée avec mes parents qui étaient eux vraiment férus de nature. On allait à dos de mulet dans les montagnes du Haut Atlas, dans la vallée de Tassaout, la forêt de Bouskoura et on campait pendant une petite semaine », se souvient la petite fille qui sommeille en elle.

Une époque durant laquelle elle a développé un amour pour les animaux, pour la nature et pour son pays qu’elle ne saurait expliquer aujourd’hui. « C’est ce qui m’a permis de découvrir des endroits reculés du Maroc, de voir l’hospitalité dans toute sa splendeur et ça m’a donné ce sentiment de patriotisme à un très jeune âge ».

Noor Slaoui avec son cheval (Others)

Une passion pour le voyage, la découverte qui se marie finalement bien avec les chevaux, puisqu’à dos des équidés elle s’évade chaque jour un peu plus. D’ailleurs, le cheval l’inspire toujours autant à l’aube de ses trente ans, elle fait de ses animaux presque ses enfants tant elle leur voue un amour inconditionnel. « Je trouve que le cheval est un animal fascinant, il pèse une demi-tonne et ne parle pas mais il communique de manière incroyable. C’est vraiment une éponge à émotions et c’est ce que j’adore ! », s’exclame Noor. « Quand j’ai un partenariat avec un cheval, on ne forme qu’un et c’est ce qui rend ce sport encore plus spécial ».

Et pour cause, son cheval de bataille aujourd’hui est le complet où elle s’illustre. « J’ai commencé la compet’ assez tard, quand je suis arrivée en Angleterre à 19 ans. C’est là où j’ai découvert le complet et j’ai commencé au plus petit niveau, et puis je n’ai plus jamais lâché », raconte la championne. En effet, c’est en trottant que la jeune Marocaine a gravi les échelons, pour se qualifier aujourd’hui aux JO. Non sans sacrifices et sans longues heures de travail. Un travail fourni en équipe et aux côtés de « Deborah Fellous, c’est ma coach. Je l’ai rencontrée il y a 7 ans de cela. Elle a beaucoup travaillé avec des cavaliers olympiques et elle m’apporte beaucoup au quotidien. C’est aussi ma business partner et c’est vrai que tout cela a changé mon équitation parce qu’elle me comprend et elle connaît bien les chevaux. »

Les chevaux comme thérapie

Et d’ajouter : « elle m’aide aussi dans l’entraînement des chevaux donc on est hyper complémentaires. Ça a été bénéfique pour moi spécialement parce que j’ai dû apprendre énormément en un temps imparti ». Mais Noor a également misé sur le bon cheval pour atteindre ces excellents résultats, « Cash in Hand », avec qui elle entretient une relation plus que fusionnelle. Une touche qui fait la différence pour la cavalière. « L’amour que j’ai pour mes chevaux est unique. Pour moi, l'équitation, ce n’est pas juste un sport. Je fais tout avec mes chevaux, que ce soit du grooming, je les conduis en concours de A à Z et je les connais sur pleins d’aspects différents. »

Noor aurait presque mangé du cheval tant son énergie est débordante entourée de ses chevaux. « Je pense que c’est important d’apporter ma petite pierre à l’édifice pour développer le sport, motiver les jeunes à suivre leur passion ou à découvrir leur passion pour ceux qui n’en ont pas », souligne la jeune trentenaire. Une femme pleine d’ambition et de projets. « Je me tourne donc beaucoup vers l’équithérapie, j’essaye d’améliorer les choses comme je peux à mon échelle ».

Après un Bac ES au Maroc, Noor prend une année sabbatique durant laquelle elle s’envole pour la France. Elle pose ses valises à Saumur où elle passe son monitorat d’équitation avant de prendre la direction de l’Angleterre pour reprendre des études en sciences politiques, un cursus riche et qui lui a été bénéfique dans le sport. « Je pense que les études m’ont aidé à structurer mon esprit. Et je me suis rendu compte que même en étant busy, j’y arrivais, qu’il fallait donc que je ne lâche pas », raconte-t-elle. Une éternelle insatisfaite qui ne cesse de se remettre en question et qui fait la fierté de sa famille au point d’inspirer certains membres.

« On montait tous à cheval pour le loisir, je suis la seule à le pratiquer de manière professionnelle. Cela dit ma petite sœur est fan de polo, elle joue très bien au polo ».

Pour autant, elle ne peut s’empêcher d’évoquer ses parents, à qui Noor doit beaucoup. Elle relate, l’émotion dans la voix : « mes deux parents ont une place importante dans mon histoire. Ma mère a eu un accident et est devenue paraplégique. C’est vrai que sa vie a changé mais cela ne l’a jamais limitée. D’ailleurs, à l'hôpital, mon grand-père lui avait dit une phrase magnifique : ‘’Dieu t’a enlevé tes jambes pour marcher mais il t’a donné des ailes pour voler’’. Et c’est vraiment avec ces mots que j’ai été élevée. »

Les JO, enfin l’aboutissement ?

Pour cette marocaine, il faut simplement accepter que la vie peut changer du jour au lendemain et faire confiance au futur et au process.

« Mes parents m’ont toujours encouragée et depuis petite je leur dis que je veux aller aux JO, ils m’ont toujours répondu qu’ils croient en moi et ont toujours été présents en compet’ à me supporter », s’émeut la jeune femme.

« Pour moi, ma qualification olympique c’est l’aboutissement de nombreuses années de travail. Maintenant, il faut faire attention jusqu’au bout que le cheval soit en bonne forme, que moi je ne me blesse pas jusqu’à juillet, il faut être vigilant ».

Noor Slaoui en action (Others)

Un sacré challenge qui attend cette championne qui n’en est pas à son coup d’essai et qui est habituée aux grands concours. Elle dompte donc le stress et la pression comme personne ! « Je vois les JO comme une expérience exceptionnelle, c’est une étape dans ma carrière car mon objectif final est de participer à d’autres championnats, et d’être encore plus compétitive. Je donnerai le meilleur de moi-même cet été », promet-elle sur un ton enjoué.

Et c’est dire ce qui attend la jeune athlète, « le concours complet c’est vraiment un sport qui me passionne et j’adore le fait qu’il y ait trois disciplines. C’est un triathlon et avec le même cheval on fait du dressage, du saut d’obstacles et du cross. C’est incroyable car il faut être polyvalent et si je peux faire découvrir cette discipline au plus grand public au niveau des pays arabes, de l’Afrique et du Maroc c’est déjà une victoire pour moi », poursuit Noor.

Voir grand, rêver grand

Un travail derrière lequel elle a bien évidemment un message à faire passer, « le message le plus profond derrière ce que je fais, c’est de ne pas avoir peur de l’échec et se fier à son instinct. C’est ce que je veux partager avec tout le monde ».

« J’ai eu beaucoup de chance d’avoir commencé en Angleterre car c’est le fief du complet, tous les champions y sont basés. Dès mes débuts, j’ai pu concourir avec le top mondial, j’ai donc pu avoir l’inspiration des meilleurs en face de moi. Évoluer dans ce milieu dans ce pays, ça me permet de puiser mon inspiration chaque jour ».

Un rêve devenu réalité avec le soutien, reconnaît-t-elle, de la fédération royale marocaine des sports équestres. Mais plus Noor rêve, plus elle voit grand : « d’un point de vue sportif, j’aimerais atteindre le top mondial et pouvoir ramener des médailles. Je vais travailler dur pour cela. », se motive-t-elle. Mais ce n’est pas assez pour la Marocaine et patriote, « un de mes rêves serait d’avoir une équipe marocaine que je ne sois pas seule dans le complet. Je pense qu’à terme cela se fera », affirme-t-elle avec beaucoup d’optimisme.


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