Des militaires annoncent l'annulation des élections et la dissolution des institutions / Photo: AFP (AFP)

Un groupe d'une douzaine de militaires gabonais a annoncé mercredi, dans un communiqué lu sur la chaîne de télévision Gabon 24, l'annulation des élections et la dissolution de "toutes les institutions de la République".

Après avoir constaté "une gouvernance irresponsable, imprévisible, qui se traduit par une dégradation continue de la cohésion sociale risquant de conduire le pays au chaos […] nous avons décidé de défendre la paix en mettant fin au régime en place", a déclaré un de ces militaires, disant s'exprimer au nom d'un "Comité de transition et de restauration des institutions". "À cet effet, les élections générales du 26 août 2023 ainsi que les résultats tronqués sont annulés", a-t-il ajouté.

"Toutes les institutions de la République sont dissoutes, le gouvernement, le Sénat, l'Assemblée nationale, la Cour constitutionnelle. Nous appelons la population au calme et à la sérénité et nous réaffirmons notre attachement au respect des engagements du Gabon à l'égard de la communauté internationale", a-t-il poursuivi, annonçant aussi la fermeture des frontières du pays "jusqu'à nouvel ordre".

Peu après la lecture de la déclaration des militaires, des journalistes de l'AFP et de Reuters ont entendu des tirs d'armes automatiques dans plusieurs quartiers de Libreville.

L'annonce de ce coup de force est intervenue peu après la publication des résultats officiels de l'élection présidentielle de samedi, qui a vu le président sortant Ali Bongo Odimba, au pouvoir depuis 14 ans, décrocher un troisième mandat avec 64,27 % des suffrages.

Selon ces résultats proclamés par le président du Centre gabonais des élections (CGE), Michel Stéphane Bonda, à l'antenne de la télévision d'État Gabon 1ère, le principal rival de M. Bongo, Albert Ondo Ossa, n'a recueilli que 30,77 % des voix.

Si réussi, ce coup d'État serait le huitième en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale depuis 2020. Des militaires ont renversé le pouvoir en place au Mali, en Guinée, au Burkina Faso, au Tchad et au Niger.

Les tensions étaient vives au Gabon, où l'on craignait des troubles après le scrutin présidentiel, parlementaire et législatif de samedi, qui a vu Bongo chercher à prolonger son pouvoir, tandis que l'opposition poussait au changement dans ce pays riche en pétrole et en cacao, mais frappé par la pauvreté.

L'absence d'observateurs internationaux, la suspension de certaines émissions étrangères et la décision des autorités de couper l'accès à Internet et d'imposer un couvre-feu nocturne dans tout le pays après le scrutin ont suscité des inquiétudes quant à la transparence du processus électoral.

Le Gabon a déjoué une tentative de coup d'État militaire en janvier 2019 après que des soldats se soient brièvement emparés de la station de radio d'État et aient diffusé un message indiquant que M. Bongo, qui avait été victime d'un accident vasculaire cérébral quelques mois plus tôt, n'était plus apte à exercer ses fonctions.

La situation a été rétablie quelques heures plus tard, après que deux des putschistes présumés ont été tués et d'autres arrêtés.

Au pouvoir depuis 2009

M. Bongo, 64 ans, qui a succédé à son père Omar en tant que président en 2009, était opposé à 18 candidats, dont six ont soutenu M. Ondo Ossa.

Le gouvernement a déclaré que la coupure d'Internet et le couvre-feu étaient nécessaires pour empêcher la propagation de fausses nouvelles et pour protéger la sécurité publique. La victoire contestée de M. Bongo aux élections de 2016 a provoqué de violentes manifestations au cours desquelles le bâtiment du parlement a été incendié.

Son équipe a rejeté les allégations de fraude formulées par Ondo Ossa et son alliance d'opposition après un scrutin entaché par l'ouverture de nombreux bureaux de vote avec plusieurs heures de retard.

L'alliance Alternance 2023 a également fait état d'autres irrégularités présumées, notamment le fait que les bulletins de vote de ses candidats n'avaient pas été déployés correctement dans certaines zones. Reuters qui a rapporté l’info n'a pas pu vérifier ces allégations de manière indépendante.

L'Union européenne n'a pas été invitée à observer cette élection. Les observateurs de l'UE avaient déjà remis en question la validité de la courte victoire de M. Bongo lors du scrutin présidentiel de 2016.

Lundi, l'organisation de surveillance des médias Reporters sans frontières (RSF) s'est inquiétée du blocage d'Internet et de la suspension temporaire par le Gabon des émissions des médias internationaux français RFI, France 24 et TV5 Monde.

L'opposition a contesté les deux précédentes victoires électorales de M. Bongo, invoquant des fraudes. M. Bongo a accédé au pouvoir pour la première fois en 2009, à la suite du décès de son père Omar Bongo, avant d'être réélu en 2016.

Agences