Le drapeau de l'Azerbaïdjan   (Others)

Martin Ryan, homme d'affaires français, est actuellement en détention à Bakou. Arrêté en Azerbaïdjan depuis le 4 décembre, il est suspecté d'espionnage, quelques jours après le renvoi réciproque de diplomates des deux pays sur fond de vives tensions bilatérales.

"Soupçonné d'avoir commis des actes d'espionnage, Martin Ryan (...) a été arrêté le 4 décembre", a indiqué Leyla Abdullayeva, ambassadrice de l'Azerbaïdjan à Paris, à l'AFP.

"Plus tard, la justice a ordonné sa détention pour une durée de quatre mois", a expliqué Leyla Abdullayeva l’Ambassadrice d’Azerbaidjan à Paris, soulignant que "l'ambassade de France à Bakou (avait) été informée par une note verbale" et qu'il avait reçu des visites consulaires "à plusieurs reprises".

L'ambassade de France à Bakou et le Quai d'Orsay n'avaient toujours pas réagi mardi matin.

L'affaire avait fuité il y a quelques jours dans des médias en ligne, notamment en Azerbaïdjan, mais sans confirmation officielle. Elle intervient alors que les relations s'enveniment entre Paris et Bakou.

Le président azerbaïdjanais Ilham Aliev reproche en effet à la France de soutenir l'Arménie dans le conflit qui oppose Erevan et Bakou. En novembre dernier, il avait accusé Paris de "préparer le terrain pour une nouvelle guerre" dans le Caucase en "armant" l'Arménie, après l'annonce de la vente à Erevan d'équipements français pour sa défense sol-air.

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De son côté, Paris avait accusé des acteurs liés à l'Azerbaïdjan d'avoir mené une campagne de manipulation visant à porter atteinte à la réputation de la France dans sa capacité à accueillir les jeux Olympiques 2024.

"Comme un pion"

En décembre, les tensions sont montées d'un cran avec l'expulsion réciproque de deux diplomates. Une affaire que le père du Français détenu, Richard Ryan, estime liée à son arrestation alors que son fils avait exprimé dans le passé des positions pro-Bakou.

"On a parlé avec lui quatre fois, chaque fois deux minutes. Il dit qu'il est bien traité et qu'il s'entend bien avec son avocat", a-t-il expliqué à la presse. "Une fois, il m'a dit : “on a voulu m'utiliser comme un pion", a-t-il assuré.

Le 17 mai 2021, l'homme d'affaires avait signé avec d'autres Français résidant en Azerbaïdjan une lettre ouverte au président Emmanuel Macron, "restée sans suite", selon lui. Dans cette lettre, les signataires dont Martin Ryan demandaient au chef de l'État "des gestes forts" pour "la normalisation des relations franco-azerbaïdjanaises" mises à mal "par des déclarations extrêmement maladroites et partiales" de la diplomatie française, jugée pro-arménienne.

Dans un autre courrier envoyé en janvier 2023 à Anne Genetet, députée de la 11e circonscription des Français de l'étranger (Asie, Océanie et Europe orientale), l'entrepreneur, spécialisé dans l'importation et la distribution de produits alimentaires, avait aussi dénoncé la position française sur le conflit entre Bakou et Erevan.

"Des éléments radicaux de la diaspora arménienne en France mènent sans relâche une véritable campagne anti-Azerbaïdjan et diffusent une propagande mensongère", écrivait-il, regrettant que l'image de la France se soit "considérablement dégradée" en Azerbaïdjan, au détriment des intérêts français.

Ce mardi, son avocat commis d'office, Me Nizami Aliyev, a affirmé que son client avait été en contact avec des Français sur place dont il avait appris ensuite qu'ils étaient des "agents" du renseignement français. "Martin n'est pas un agent" a-t-il déclaré, tout en assurant que le dossier n'était "pas politique".

Il est passible, selon lui, d'une peine de 10 à 15 ans de prison.

Depuis 30 ans, l'Arménie et l'Azerbaïdjan, deux anciennes républiques soviétiques, sont en conflit territorial au sujet de la région du Haut-Karabakh. En septembre dernier, Bakou y a mené une offensive éclair conduisant à la capitulation des séparatistes arméniens.

La quasi-totalité de la population arménienne de la région - plus de 100.000 personnes sur 120.000 - a depuis fui vers l'Arménie.

Les deux voisins s'étaient déjà affrontés lors de deux guerres pour le contrôle de cette enclave, l'une entre 1988 et 1994, l'autre à l'automne 2020. Bakou et Erevan ont récemment annoncé leur volonté de normaliser leurs relations mais les pourparlers n'avancent guère.

Dans ce dossier, la France, terre d'accueil d'une importante diaspora arménienne, s'est dite prête à participer aux efforts de médiation, tout en affichant son soutien sans faille à l'Arménie qui redoute la violation de son intégrité territoriale.

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AFP