Sondage sur l’”antisémitisme”: des syndicats saisissent le Conseil d’État

Plusieurs organisations syndicales, la Ligue des droits de l’homme et six enseignants-chercheurs ont déposé un recours auprès du Conseil d’État afin de suspendre la diffusion du sondage sur l’”antisémitisme” dans l’enseignement supérieur.

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Un montage de Mediapart concernant le sondage sur l'"antisémitisme" à l'université. / TRT Français

Le questionnaire, lancé le 18 novembre, commandé par le ministère de l’Enseignement supérieur et diffusé par l’IFOP, visait à interroger les personnels universitaires sur l’”antisémitisme” dans l’enseignement supérieur, mais comportait également des questions sur l’image d’Israël, les responsabilités dans le conflit israélo-palestinien, la religion et l’appartenance ou proximité avec un parti politique. 

Les répondants devaient aussi fournir des informations personnelles telles que l’âge, le genre, la fonction, le type d’établissement et l’académie, le plus haut diplôme et le code postal de résidence. 

Les plaignants dénoncent le risque d’identification malgré l’anonymat annoncé, ainsi que l’usage d’un lien Google pour accéder au questionnaire, susceptible de collecter des adresses IP.

Le sondage a été interrompu vendredi 28 novembre, dix jours seulement après son lancement. 

Toute personne tentant d’y répondre voyait alors le message “The survey is closed”. Ni l’IFOP, ni le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), chargé d’exploiter les résultats, ni le ministère n’ont expliqué les raisons de cet arrêt.

France Universités, représentant les présidents d’université, avait déjà exprimé, le 24 novembre, des réserves sur la conception du questionnaire et certaines questions jugées problématiques. 

Des critiques ont été formulées sur l’absence de validation scientifique préalable. La commande n’a pas été soumise à une commission scientifique, contrairement aux procédures habituelles pour des enquêtes de cette ampleur.

À Sciences Po, une cinquantaine d’enseignants du département de sciences politiques ont acté la nécessité d’une “discussion collective” sur la collecte des données et le risque d’instrumentalisation politique. 

Une journée d’études est prévue au printemps 2026 pour définir une politique plus explicite sur la commande de sondages par des acteurs publics.

Les plaignants soulignent également que le traitement statistique n’a pas reçu d’avis du Conseil national de l’information statistique, et que les questions sur la religion et les opinions politiques relèvent de données sensibles nécessitant une protection spécifique.