Gaza: la FIS proposée par Washington rejetée par la Russie, la Chine et plusieurs pays arabes
La Russie, la Chine et plusieurs pays arabes ont exprimé leurs préoccupations concernant la structure du mécanisme de gouvernance post-guerre et l’absence de rôle transitoire pour l’Autorité palestinienne.
Selon quatre diplomates onusiens au courant des discussions, Moscou et Pékin — tous deux membres permanents du Conseil de sécurité dotés d’un droit de veto — ont exigé que la “Board of Peace” proposée dans le plan de cessez-le-feu du président Donald Trump soit entièrement retirée du projet de résolution.
Dans le texte révisé distribué mercredi soir, les États-Unis ont conservé la mention du conseil mais ajouté des références au droit des Palestiniens à l’autodétermination, tentant ainsi de répondre aux critiques selon lesquelles le précédent projet manquait d’horizon politique.
Si les diplomates reconnaissent que les négociations reflètent un va-et-vient habituel sur le choix des mots, les objections révèlent des divergences profondes entre Washington et certains membres de l’organe le plus puissant de l’ONU, après plus de deux ans de génocide.
Le secrétaire d’État américain Marco Rubio a déclaré que la résolution devait être adoptée “immédiatement”, soulignant qu’il ne fallait pas perdre l’élan.
“Je pense que nous faisons de bons progrès”, a-t-il dit à des journalistes avant de quitter une réunion du G7 au Canada.
Le Conseil de sécurité pousse à des amendements
Le projet américain initial, distribué la semaine dernière, appelait à un mandat large permettant à une force internationale d’opérer à Gaza jusqu’en 2027 aux côtés de la Board of Peace, qui n’a pas encore été établie.
Les pays arabes qui ont montré un intérêt à contribuer avec des troupes affirment qu’une telle autorisation est indispensable.
La Russie, la Chine et l’Algérie ont rejeté le projet, et tous les membres du Conseil de sécurité sauf deux ont soumis des amendements.
Les points clés qui suscitent des réactions sont l’absence de voie claire vers la création d’un État palestinien et l’incertitude sur le moment où les forces israéliennes se retireraient de Gaza.
Le projet révisé indique qu’une fois que les réformes de l’Autorité palestinienne auront été “mises en œuvre de bonne foi” et que la reconstruction aura progressé, les conditions “pourraient être réunies pour une voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien”.
Il précise également que les forces israéliennes se retireront lorsque la force de stabilisation “établira le contrôle et la stabilité”, selon des “normes, étapes et échéanciers” convenus.
Certains membres ont demandé aux États-Unis de préciser qui siégerait à la Board of Peace et comment elle fonctionnerait.
Les Émirats arabes unis, un partenaire clé de Washington, ont déclaré qu’ils ne voyaient actuellement aucun cadre clair pour la force de stabilisation et qu’ils ne sont pas susceptibles de participer dans les conditions actuelles.
Des diplomates ont indiqué que certains pays souhaitent une adoption rapide afin de maintenir les progrès sur le terrain, tandis que d’autres avertissent que les États-Unis pourraient recourir à une “coalition de volontaires” en dehors de l’ONU si les négociations s’enlisent.
La Russie propose sa propre résolution à l’ONU
La Russie a proposé son propre projet de résolution sur Gaza, défiant l’effort américain visant à faire adopter par le Conseil de sécurité un texte soutenant le plan de paix pour Gaza du président Donald Trump, selon une copie du projet consultée par l’agence Reuters.
Ce projet demande au secrétaire général de l’ONU d’identifier des options pour une force internationale de stabilisation à Gaza et ne mentionne pas la “Board of Peace” proposée par les États-Unis comme administration transitoire.
La mission russe à l’ONU a déclaré dans une note adressée jeudi après-midi aux membres du Conseil de sécurité — également consultée par Reuters — que sa “contre-proposition s’inspire du projet américain”.
“L’objectif de notre projet est de permettre au Conseil de sécurité d’élaborer une approche équilibrée, acceptable et unifiée afin d’aboutir à une cessation durable des hostilités”, indique la note.
Le projet américain évoque un futur État palestinien
Par ailleurs, un troisième projet de résolution, consulté jeudi par l’AFP, “accueille favorablement la création de la Board of Peace”, un organe de gouvernance transitoire pour Gaza — que Trump présiderait théoriquement — avec un mandat courant jusqu’à fin 2027.
Il autoriserait les États membres à former une “Force internationale temporaire de stabilisation” qui travaillerait avec Israël, l’Égypte et une police palestinienne nouvellement formée pour sécuriser les zones frontalières et démilitariser Gaza.
La FIS serait également chargée de la “mise hors service permanente des armes appartenant aux groupes armés non-étatiques”, de la protection des civils et de la sécurisation des corridors humanitaires.
Contrairement aux versions précédentes, le nouveau texte mentionne la possibilité d’un futur État palestinien.
Une fois que l’Autorité palestinienne aura réalisé les réformes demandées et que la reconstruction de Gaza aura commencé, “les conditions pourraient enfin être réunies pour une voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien”, indique le texte.
“Les États-Unis établiront un dialogue entre Israël et les Palestiniens pour s’accorder sur un horizon politique permettant une coexistence pacifique et prospère”, ajoute-t-il.
La mission américaine auprès de l’ONU a exhorté le Conseil de sécurité à avancer sur la résolution américaine, avertissant que les Palestiniens pourraient sinon subir de “graves” conséquences.
“Tenter de semer la discorde maintenant — alors même qu’un accord sur cette résolution est en cours de négociation — a des conséquences graves, tangibles et totalement évitables pour les Palestiniens de Gaza”, a déclaré un porte-parole de la mission américaine.
“Le cessez-le-feu est fragile et nous exhortons le Conseil à s’unir et à aller de l’avant pour garantir la paix dont la région a désespérément besoin”, a poursuivi le porte-parole, qualifiant le moment d’”historique pour ouvrir une voie vers une paix durable au Moyen-Orient”.
En octobre, Israël et le mouvement de résistance palestinien Hamas ont accepté la première phase du plan en 20 points de Trump pour Gaza, prévoyant un cessez-le-feu de deux ans et un accord d’échange captifs-prisonniers.
Ce plan en 20 points est annexé au projet de résolution américain.
Trump a exclu l’envoi de soldats américains dans Gaza assiégée, mais des responsables ont évoqué une force d’environ 20 000 hommes et ont entrepris des discussions avec l’Indonésie, le Pakistan, les Émirats arabes unis, l’Égypte, le Qatar, la Türkiye et l’Azerbaïdjan pour y contribuer.