Gaza: des professionnels de santé appellent la France à renforcer les évacuations médicales

Dans une tribune au Monde, des médecins et responsables d’ONG alertent sur l’effondrement du système de santé à Gaza et appellent la France à accroître les évacuations médicales de civils palestiniens nécessitant des soins indisponibles sur place.

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Un jeune Palestinien blessé, Mohammed Helles, victime d’une lésion de la moelle épinière lors de frappes israéliennes / Reuters

Les signataires, issus des milieux hospitaliers, associatifs et universitaires, décrivent un système de santé “presque entièrement détruit”.

Ils affirment que les hôpitaux de l’enclave ont été gravement endommagés par les opérations militaires israéliennes, au point qu’aucun établissement ne fonctionne aujourd’hui à pleine capacité.

La capacité hospitalière est tombée à moins de 2 000 lits pour une population de plus de 2,1 millions d’habitants.

D’après les données citées par les auteurs qui se basent sur les chiffres de l’ONU, au moins 1 722 professionnels de santé ont été tués depuis le début du conflit et plus de 300 auraient été arrêtés.

Non à l’inaction

Les organisations humanitaires présentes à Gaza, dont Médecins sans frontières (MSF), font état de pénuries aiguës de matériel médical, de médicaments et de nourriture. 

“Gravement atteints par les maladies, par des brûlures ou par des blessures de guerre, ces patients ne peuvent être traités sur place. Face à ce tableau, décrit par Médecins sans frontières (MSF) et par d’autres organisations médicales qui œuvrent sur le terrain, l’inaction ne peut être une option”, s’indignent les signataires.

De nombreux équipements, tels que des concentrateurs d’oxygène, des tables d’opération ou des instruments chirurgicaux de base, restent bloqués en raison de restrictions liées à une prétendue possibilité de “double usage” civil et militaire.

Ces contraintes affectent directement la prise en charge des brûlures, des traumatismes graves, des cancers et des maladies chroniques. Les soins spécialisés, notamment la chirurgie lourde, la dialyse ou les traitements oncologiques, sont largement indisponibles dans l’enclave.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 16 500 patients sont inscrits sur une liste d’évacuation médicale, parmi lesquels 2 900 seraient dans un état critique et 3 800 seraient des enfants.



Ces patients souffrent notamment de traumatismes sévères, de malformations congénitales ou de pathologies chroniques comme l’insuffisance rénale ou le cancer.

Entre juillet 2024 et août 2025, 740 patients, dont 137 enfants, en attente d’évacuation seraient décédés faute de soins adaptés,  selon les chiffres cités dans la tribune.

Malgré l’entrée en vigueur d’un cessez-le-feu à Gaza le 10 octobre, les auteurs estiment que l’accès aux soins reste très limité pour les patients avec les atteintes les plus graves. La reconstruction du système de santé est présentée comme un processus de long terme, nécessitant des investissements importants.

Les signataires pointent également les obstacles administratifs et politiques qui freinent les évacuations médicales, principalement la réticence de nombreux États à accueillir ces patients.

Sur les quelque 8 000 personnes évacuées de Gaza vers différents pays, la France aurait pris en charge 27 patients. À titre de comparaison, l’Italie en aurait accueilli 211 et l’Espagne 65. En novembre 2023, le président Emmanuel Macron s’était engagé à accueillir 50 enfants nécessitant des soins.

Les auteurs rappellent enfin que la France avait accueilli des patients étrangers lors du conflit en Ukraine et soulignent que des hôpitaux et cliniques français disposent des compétences et des capacités nécessaires pour prendre en charge un plus grand nombre de patients évacués de Gaza.

Parmi les signataires figurent notamment Hervé Benateau, chirurgien maxillo-facial ; Eric Cheysson, président de la Chaîne de l’espoir ; Jean-François Corty, président de Médecins du monde ; Isabelle Defourny, présidente de Médecins sans frontières ; Isabelle Desguerre, neuropédiatre ; Stéphane Gaudry, praticien en médecine intensive-réanimation ; Yousra Kherabi, infectiologue ; Marie-Rose Moro, pédopsychiatre ; Nathan Peiffer-Smadja, infectiologue ; Rémi Salomon, néphrologue pédiatrique ; Marc Samama, anesthésiste-réanimateur ; et Elisabeth Sauvaget, chirurgienne ORL.