Le “souverainisme économique” du Mali gagne l’Afrique
La politique de souverainisme économique implémentée par le Mali, pour tirer le meilleur parti de son sous-sol, gagne du terrain en Afrique.
En imposant à Barrick Gold et aux autres multinationales exploitant ses minerais un nouveau code minier avec effets rétroactifs, les autorités maliennes étaient loin d’imaginer l’impact national et international de leur initiative. Le Mali avait placé l’exploitation d’or sous administration provisoire, confisqué une partie de la production d’or et interpellé plusieurs cadres de cette multinationale.
Après de discrètes négociations, le Mali et Barrick Gold ont finalement trouvé le 25 novembre dernier, un terrain d’entente. Barrick Gold a finalement accepté le nouveau code minier malien et a récupéré ses 3 tonnes d’or confisqués par les autorités.
De plus, Barrick Gold s'est engagée à retirer sa demande d'arbitrage en instance devant le Centre international pour les différends relatifs aux investissements et à payer immédiatement les taxes définies par le nouveau code minier.
Pour sa part, le Mali récupère 244 milliards de francs CFA (environ 430 millions de dollars), en guise de remboursement des arriérés fiscaux et douaniers accumulés entre 2018 et 2024. L'accord ouvre également la voie à des dividendes annuels estimés à 90 milliards de francs CFA.
S’inspirant du Mali, les autorités nigériennes ont nationalisé Somaïr (la filiale de la multinationale française Orano) qui exploite les gisements d'uranium dans la région d’Arlit. Avant sa nationalisation, Somaïr était détenu par Orano à hauteur de 63,40% contre 36,60% pour l’Etat du Niger. Les autorités nigériennes reprochent à l'opérateur français Orano le non-respect des clauses contractuelles dans le partage de la production de l'uranium, ainsi que le départ des employés expatriés après le coup d'État de 2023 suivi par la déconnexion de la Somaïr du réseau informatique d’Orano.
Actuellement, le Niger a commencé à placer sur le marché international une partie de l'uranium produit par Somaïr, en dépit des protestations d’Orano.
La Côte d’Ivoire et le Botswana
A l’instar du Mali, la Côte d’Ivoire a revu à la hausse les taxes minières. Elle vient d’imposer une redevance unique de 8 % sur les ventes brutes d’or, en remplacement de l’ancien système qui prévoyait des taux de 3 à 6 %. La mesure, contestée par les grandes compagnies d’exploitation d’or, est appliquée rétroactivement à partir de janvier 2025.
La dynamique du souverainisme économique impulsée par le Mali a aussi gagné le Botswana. Ce pays, considéré comme l’un des plus grands producteurs de diamant, voudrait contrôler De Beers. Cette multinationale est leader dans la commercialisation des pierres précieuses. Actionnaire de l’entreprise à hauteur de 15 %, le Botswana veut s’emparer des 85 % de parts détenues par Anglo American.
Le président du Botswana, Duma Boko, est très motivé dans cette initiative malgré les réserves de la Banque Mondiale. Il espère qu’au bout de l'opération, son pays deviendrait propriétaire de la plus grande entreprise de commercialisation de diamants dans le monde. Ainsi il pourrait déplacer le siège de la multinationale de Londres à Gaborone et tirer le meilleur parti de sa production dimantaire.
De Beers “s’approvisionne à 70 % en diamants au Botswana, et nous n’en possédons que 15 %. Nous souhaitons accroître notre part et devenir les véritables propriétaires”, a déclaré le chef de l'État botswanais au journal local Mmegi. “Une fois que ce sera fait, a-t-il poursuivi, nous remettrons les opérations sur les rails et installerons le siège social ici (Gaborone,la capitale du Botwana, NDLR) afin que lorsqu’on affirme que le Botswana est un pays diamantaire, on puisse le constater concrètement sur les visages et dans d’autres secteurs de l’économie.”