Le ministère de l’Intérieur français porte plainte contre les auteurs du jeu de cartes Fachorama
Le ministère français de l’Intérieur a porté plainte contre les auteurs du jeu de société Fachorama, estimant que ce dernier contenait des propos injurieux envers les forces de l’ordre.
Selon l'information rapportée ce mercredi par BFMTV et confirmée par France Bleu, le ministère de l’Intérieur a indiqué avoir déposé une plainte pour "injure publique" contre les auteurs du jeu de société Fachorama, une qualification qui viserait plusieurs éléments du jeu publié par les éditions Libertalia en partenariat avec le collectif antifasciste La Horde.
Le jeu, qui reprend le principe du jeu des 7 familles, met en scène des personnages fictifs associés à l’extrême droite, dans des catégories aux noms provocateurs comme "On est chez nous", "C’était mieux avant" ou "La famille Patrie". Certains personnages sont habillés en policiers, une représentation jugée offensante par plusieurs syndicats.
"Ce jeu porte atteinte à l'honneur et au travail qui est fait par l'ensemble des policiers", a estimé Thierry Clair, secrétaire général d’Unsa Police, dans un entretien accordé à BFMTV. Il dénonce des "amalgames nauséabonds" et une "caricature haineuse" qui viseraient directement les agents de l’État.
Le syndicat Alliance Police Nationale a également exprimé son indignation, accusant le jeu de "banaliser le mépris" envers la profession. Dans une publication sur les réseaux sociaux, le syndicat a exigé son retrait immédiat des rayons et des plateformes en ligne.
De leur côté, les éditions Libertalia défendent un projet militant et pédagogique. Contactée par plusieurs médias, la maison d’édition revendique une intention de "dénoncer les idéologies d’extrême droite" et précise que Fachorama s’inscrit dans la lignée d’autres projets engagés, comme Antifa, le jeu, déjà visé par une polémique en 2022.
Le jeu est toujours en vente sur le site de l’éditeur, accompagné d’un encadré explicatif rappelant que "toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé serait purement fortuite… ou pas".
Cette plainte contre Fachorama intervient dans un climat social particulier, où les questions de violences policières occupent une place croissante dans le débat public. Entre 2016 et 2024, le nombre d’affaires nouvelles impliquant des violences commises par des agents de l’État est passé de 700 à 1 110, soit une hausse de plus de 50 %. Parallèlement, le taux d’élucidation de ces violences a chuté de 68 % à 51 %, tandis que la proportion de policiers poursuivis est tombée à 17,5 %.
Les décès liés à des interventions policières ont également augmenté, atteignant un pic de 52 morts en 2021.
Dans ce contexte, la réception d’un jeu satirique critiquant l’autorité et les dérives sécuritaires prend une résonance particulière, au-delà de la seule polémique éditoriale : elle interroge la capacité des institutions à accepter la critique, alors même que la confiance entre la population et les forces de l’ordre s’effrite.