Macron-Xi Jinping : la Chine rechigne à soutenir l’Europe dans le dossier ukrainien

Le président français Emmanuel Macron a pressé ce jeudi son homologue chinois Xi Jinping d'œuvrer à mettre fin à la guerre en Ukraine et à corriger les déséquilibres commerciaux. Deux dossiers entremêlés mais quel est l’intérêt de la Chine ?

By
Emmanuel Macron est en visite officielle en Chine jusque vendredi où il ira dans le pays des Pandas / Reuters

Le chef de l’Etat français était venu chercher un soutien dans le dossier ukrainien pour sa quatrième visite en Chine. Lors d'une apparition commune devant les médias, Emmanuel Macron a dit avoir "longuement évoqué" avec son homologue l'Ukraine, "menace vitale pour la sécurité européenne". "J'espère que la Chine pourra se joindre à notre appel et à nos efforts pour parvenir dans les meilleurs délais à tout le moins à un cessez-le-feu", a-t-il précisé.

Il avait auparavant qualifié la coopération avec la Chine de "déterminante" sur l'Ukraine. Il avait plus largement reconnu l'existence de "désaccords", mais avait affirmé "la responsabilité de savoir les dépasser, de trouver des mécanismes de coopération, de règlement des différends pour un multilatéralisme efficace auquel nous croyons". Emmanuel Macron lance une idée de partenariat : “En faveur de la paix, pour la stabilité du monde, notre capacité à travailler ensemble est déterminante“, a-t-il conclu.

En face, la réponse a été diplomatique : "La Chine soutient tous les efforts pour la paix" et "continuera à jouer un rôle constructif pour une solution à la crise", a déclaré le dirigeant chinois. Xi Jinping y ajoute une mise au point très claire : "En même temps, la Chine s'oppose fermement à toute tentative irresponsable visant à rejeter la faute ou à diffamer quiconque".

Cela n’augure rien de facile pour les discussions de ce jeudi, les deux dirigeants doivent se rencontrer pour justement gérer les dossiers qui sont sur toutes les lèvres : l’Ukraine et l’offensive commerciale chinoise sur le marché européen qui met à mal les industries européennes. Et ces deux dossiers divisent les deux pays. 

La Chine assure vouloir la paix mais elle n'a jamais condamné l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022. Elle est un partenaire économique et politique primordial de la Russie. Ses exportations vers Moscou ont augmenté depuis 2022 et elle est le premier pays acheteur de combustibles fossiles russes au monde, y compris de produits pétroliers. Des Européens l'accusent de fournir des composants militaires à Moscou.

Une visite teintée d’intérêts commerciaux

Le chef de l'Etat français, est arrivé en Chine mercredi soir, accompagné par 35 dirigeants de grands groupes (Airbus, EDF, Danone..) et d'entreprises familiales, du luxe à l'agroalimentaire. Il a assisté à la signature d'un certain nombre de contrats.

Mais la relation commerciale sino-européenne est déséquilibrée, à tel point que c’est devenu une source de tension. Les Européens jugent les pratiques commerciales chinoises déloyales, notamment concernant la vente des voitures électriques et de l'acier à bas prix car très subventionnés.

La Chine, quant à elle, a vu se fermer le marché américain et souhaite éviter des taxes trop importantes sur le marché européen pour continuer à écouler ses productions. La relation entre la Chine et l'Union européenne se caractérise par un déficit commercial massif (357 milliards de dollars) en défaveur de l'UE. Le déficit commercial de l'UE avec la Chine a, en effet, explosé de près de 60 % depuis 2019.

Dans ce contexte, la Chine ne semble pas prête à confirmer l’achat de 500 Airbus car cela pourrait la mettre en porte-à-faux face à un Donald Trump qui veut l’obliger à acheter des Boeing. Les perspectives sur le dossier agricole ne semblent pas optimistes. Pékin n’est pas disposée à lever ses taxes sur les spiritueux dont le cognac ou sur les importations de viande de porc. Les taxes sur les spiritueux ont été imposées après celles imposées par l’UE sur les véhicules électriques chinois (octobre 2024).

Un vendredi au pays des pandas

M. Macron semble avoir été entendu dans son appel à des investissements croisés, avec un partage de technologies comparable à celui opéré par les Européens et qui a contribué au décollage économique de Pékin.

À l'issue de leurs entretiens, les deux dirigeants ont signé 12 accords de coopération portant sur le vieillissement de la population, les investissements bilatéraux, l'énergie nucléaire et la conservation des pandas.

"Les deux parties se sont engagées à promouvoir le développement équilibré des relations économiques et commerciales bilatérales, à accroître les investissements réciproques et à offrir un environnement commercial équitable, transparent, non discriminatoire et prévisible pour les entreprises des deux pays", a dit M. Xi, dont le pays a livré en 2025 aux Etats-Unis une intense guerre commerciale aux retombées mondiales.  

Comme en France en 2024, les deux couples présidentiels se retrouveront vendredi dans un cadre plus informel à Chengdu, dans la province du Sichuan (sud-ouest), berceau des pandas géants devenus des ambassadeurs de la Chine à travers le monde.